Une série de mesures strictes de confinement et d’interdictions de déplacements a contribué à faire de la Tunisie un pays leader de l’éradication des cas de Covid-19 dans la région nord-africaine. Le secteur touristique pourrait-il alors en bénéficier?
En effet, à l’heure où les restrictions s’assouplissent et où les entreprises reprennent leurs activités; les autorités ont souligné le rôle crucial du secteur touristique dans la relance économique.
Ainsi, la Tunisie n’ayant pas enregistré un seul nouveau cas de contamination au virus depuis le 2 juin, le Président Kaïs Saïed a annoncé le 8 juin la levée du couvre-feu national.
Instauré le 17 mars dernier, le couvre-feu interdisait initialement aux habitants du pays de quitter leur domicile entre 8 heures du soir et 6 heures du matin.
S’en suivait l’imposition d’un confinement national plus strict le 22 mars. Il empêchait les personnes de quitter leur domicile. Sauf pour des raisons médicales ou pour s’approvisionner en produits essentiels.
Après avoir contenu la propagation du virus avec succès, la première étape de la levée du confinement a eu lieu le 4 mai quand les secteurs du transport et de la construction. De même que certains services comme les salons de coiffures ont été autorisés à reprendre leurs activités.
Le 14 mai, les magasins, les souks et les supermarchés ont rouvert. Alors que les mosquées, restaurants et cafés ont ouvert les portes au public à nouveau, le 4 juin.
La levée du couvre-feu nocturne, qui avait était raccourci de 11 heures du soir à 5 heures du matin à la mi- mai, a marqué la prochaine étape du processus de déconfinement qui est arrivé à sa fin le 14 juin.
En date du 11 juin, la Tunisie recensait 1087 cas confirmés de Covid-19 et 49 décès liés au virus. 983 des personnes infectées étaient entièrement guéries.
Une valeur sûre
A l’heure où l’activité économique reprend dans de nombreux centres-villes, le gouvernement espère que le tourisme tirera la reprise économique.
En effet, de par son succès à contenir le virus, la Tunisie pourrait tirer son épingle du jeu et devenir une destination privilégiée pour les vacances d’été des Européens, Nord-Africains et Tunisiens.
Le pays a été classé troisième destination la plus « Covid Safe ». C’est-à-dire où le risque de contamination est le plus faible, de Méditerranée pour la saison touristique estivale; derrière le Monténégro et la Croatie. Selon des informations publiées par le cabinet de conseil basé à Tunis Targa-Consult.
S’appuyant sur des données relayées par l’Université Johns Hopkins aux Etats-Unis le 8 juin, Targa Consult a déclaré que la Tunisie comptait seulement cinq cas actifs du virus par million d’habitants. Ce qui la place légèrement derrière la Croatie, avec quatre cas, et le Monténégro, qui ne recense aucun cas.
Cela confère à la Tunisie un avantage considérable par rapport aux destinations méditerranéennes traditionnellement populaires comme l’Italie, l’Espagne et la France qui dénombrent respectivement 576, 1329 et 1362 cas par million d’habitants.
Les autorités espèrent que le succès dans l’endiguement de la Covid-19 incitera les touristes européens à choisir la destination Tunisie.
Ouverture des frontières
Le gouvernement, de son côté, compte bien tirer profit de cet avantage. Il a annoncé que les frontières maritimes, terrestres et aériennes rouvriraient le 27 juin. Les modalités de voyage seront précisées selon la situation épidémiologique dans les différents pays, ont ajouté les autorités.
Dans le cadre de mesures d’hygiène et de sécurité renforcées, toutes les personnes arrivant dans le pays devront se soumettre à des contrôles de température et leurs bagages et passeports seront désinfectés. Un deuxième contrôle de température est ensuite prévu à l’hôtel.
En outre, la capacité d’accueil des hôtels sera limitée à 50%. Afin de respecter les directives en matière de distanciation sociale. De plus, les masques seront obligatoires dans les endroits fermés tels que les musées.
La levée de l’interdiction de déplacement entre les provinces du pays, le 4 juin, vient s’ajouter à ces mesures destinées à attirer les visiteurs internationaux. Le tourisme interurbain représentant 20% des activités du secteur touristique. Ce développement pourrait être synonyme de retombées considérables pour les entreprises locales.
L’importance économique du secteur touristique dans son ensemble apparaît clairement au vu des chiffres suivants. Avant l’apparition du virus, le tourisme représentait 8% du PIB. Il employait indirectement 400 000 personnes. Le pays ayant accueilli un nombre record de 9,4 millions de touristes l’an dernier.
Les efforts déployés pour sauver la saison touristique estivale pourraient par conséquent poser les bases d’une reprise économique. Et contrebalancer ainsi les pertes essuyées par le secteur à cause du virus. Elles atteindraient selon les estimations jusqu’à 1,4 milliard de dollars cette année.
Défis de l’après-virus
Si la Tunisie a su tirer profit de son secteur industriel bien établi pour doper sa production de matériel médical au début de la pandémie. Le pays, comme bien d’autres, se voit confronté à une série de défis. A l’heure où l’activité économique reprend lentement.
D’après les prévisions du FMI, le PIB devrait se contracter de 4,3% cette année. Soit la baisse la plus marquée depuis l’indépendance en 1956. Tandis que la forte hausse du chômage due aux conséquences de la Covid-19 est source d’inquiétudes.
Afin de contribuer à lutter contre les effets immédiats de la crise, le pays a dévoilé le 23 mars un plan d’aide. Son montant est de 2,5 milliards de dinars (887,6 millions de dollars). Il comprend: un rééchelonnement des dettes fiscales; un report de trois mois des déclarations d’impôt pour les petites et moyennes entreprises; et une aide financière pour les travailleurs au chômage et les familles défavorisées.
Si la chute de la demande mondiale de produits automobiles et aéronautiques– qui représentent un pourcentage considérable de l’économie tunisienne, orientée vers les exportations– aura des conséquences douloureuses pour les entreprises locales sur le court terme. Le pays pourra profiter des efforts mondiaux de diversification des chaines d’approvisionnement déployés en réponse à la Covid-19.
Car, suite à la perturbation des chaines d’approvisionnement qui a accompagné la crise, de nombreuses entreprises cherchent à transférer certaines de leurs activités manufacturières hors de Chine pour les rapprocher de marchés clés.
Pour les entreprises axées sur l’Europe, le Tunisie, avec son secteur industriel développé et sa main-d’œuvre bon marché, fait figure de candidat sérieux pour de telles réorganisations.
Article publié le 15 juin 2020 par Oxford Business Group