Le nouveau front parlementaire annoncé par le secrétaire général du Mouvement Echaâb, Zouhaïer Meghzaoui, aura pour mission de faire du contrepoids à l’hégémonie d’Ennahdha et ses acolytes dans l’hémicycle. Mais est-ce suffisant comme plateforme, en l’absence de programme politique?
Un front politique de plus? Avec quels blocs parlementaires et pourquoi aujourd’hui? Sachant que depuis la révolution tous les fronts politiques ont lamentablement échoué faute de consensus sur un programme politique clair et bien défini. Surtout à cause de l’égo surdimensionné des partenaires politiques, maladie récurrente de la classe politique en Tunisie. Alors que recherchent les députés?
Politique d’exclusion
Car, le nouveau front annoncé mercredi 9 septembre 2020, par Zouhaïer Meghzaoui va-t-il déroger à la règle? En effet, le secrétaire général du Mouvement Echaâb et député du bloc démocrate dévoilait dans une déclaration à une radio locale qu’il y a une coordination entre un nombre de blocs au Parlement. Et ce, dans le but de former un front regroupant plus de 80 députés.
« Le bloc démocrate est à pied d’œuvre pour créer un front parlementaire. En vue de débattre des défis actuels au Parlement; notamment la Cour constitutionnelle et la loi électorale. Mais, en présence des partis populistes et avec le maintien de Rached Ghannouch au perchoir, nous ne sommes pas très optimistes! », constate-t-il.
A noter que le nouveau front est formé d’Echaâb, du Courant démocrate de Mohamed Abbou, démissionnaire et qui ne sait pas encore sur quel pied danser. Mais aussi de: la Réforme nationale de Hassouna Nasfi; de Tahya tounes de Youssef Echahed; et des indépendants. Et ce, à l’exclusion du PDL d’Abir Moussi.
Or, il est évident que ce nouveau front aura pour seule mission de s’opposer frontalement à la coalition parlementaire de 120 députés. Cette dernière que mènent Ennahdha (54 députés) et ses acolytes: Qalb Tounes (26 députés); la coalition al-Karama (19 députés); al-Mostaqbal (9 députés); ainsi que des indépendants.
Guéguerre des chefs
« Elémentaire mon cher Watson »! Où est la logique de cette démarche? S’il s’agissait de contrer Ennahdha afin de créer un nouveau contrepoids au sein de l’hémicycle… Pourquoi alors se priver des voix du PDL (17 députés) et de celle de la présidente du parti, Abir Moussi, la plus virulente opposante à l’hégémonie du parti islamiste?
Réponses: la cécité pour ne pas dire la bêtise de l’opposition; son absence de vision à moyen terme et de stratégie à long terme; les calculs d’épicier de nos politicards; et surtout, la déplorable et interminable « guéguerre » des chefs.
Realpolitik
Rappelons d’autre part que le secrétaire général du mouvement Echaâb, Zouhair Maghzaoui est revenu hier mercredi sur la rencontre que les dirigeants de son parti ont eu avec le chef du gouvernement Hichem Mechichi, au palais du gouvernement à la Kasbah.
Il a assuré à ce propos que son parti demeurait dans l’opposition; mais qu’il il allait soutenir le chef du gouvernement pour faire sortir le pays de l’impasse. « Nous allons soutenir, contrôler et critiquer Hichem Mechichi pour qu’il puisse rétablir la stabilité gouvernementale. Et qu’il ne cède pas au chantage de certaines parties politiques. Notamment celles qui ont dit: on va faire passer le gouvernement, ensuite remplacer certains ministres», annonçait-il.
A noter qu’Echaâb n’a pas voté la confiance au gouvernement Mechichi approuvé par 134 voix. Alors pourquoi ce soutien tardif mi-figue, mi-raisin au nouveau locataire de la Kasbah? Realpolitik oblige…