Dans un discours-fleuve à Sousse devant ses partisans survoltés, la présidente du Parti Destourien Libre (PDL) Abir Moussi est revenue sur certains des sujets d’actualité. Notamment la crise entre les deux présidences. Mais aussi: la Cour constitutionnelle; la motion de retrait de confiance au président du Parlement; et l’occupation de la rue par ses partisans de manière « pacifique et légale ».
Manifestement, Abir Moussi était aux anges: une participation populaire massive; une foule en liesse toute acquise à sa cause; des chants patriotiques diffusés par des haut-parleurs. La présidente du PDL haranguait la foule entassée dans la localité de Sidi Abdelhamid à Sousse.
Le seul bémol à la fête était cette curieuse coupure de la connexion Internet empêchant la diffusion en live de cette manifestation. D’ailleurs, l’oratrice accusait, nommément, le ministère des Technologies d’être à l’origine de cet incident regrettable.
« Une vulgaire guerre de positionnement »
Ainsi, dans son discours fleuve prononcé lors du rassemblement organisé dans la matinée du dimanche 21 février 2021, sous le slogan de « Révolution des Lumières », l’oratrice revenait longuement sur le sujet du jour. A savoir la crise politique, institutionnelle et constitutionnelle entre les deux têtes de l’exécutif. Pour affirmer qu’il ne s’agit point de litige sur les principes, mais d’une « vulgaire » guerre de positionnement sur l’échiquier politique. Et plus encore, d’un « simple conflit concernant les prérogatives des uns et des autres ».
D’ailleurs, a-t-elle ironisé, « le Président avait opposé son veto au remaniement ministériel, juste à la veille du vote de confiance à l’ARP; dans le cadre d’une douteuse mise en scène organisée lors de la réunion du Conseil de sécurité nationale ».
Et de poursuivre: « Kaïs Saïed fait partie de la crise politique. D’ailleurs, il a prouvé qu’il a des calculs politiques qui ne diffèrent pas des autres. Au milieu de ces calculs, l’Etat est perdu! » Tel est le constat amer qu’elle fait.
Profitant de l’occasion pour régler ses comptes, aussi bien avec le président de la République qu’avec le président de l’ARP, Abir Moussi considère que « le conflit qui perdure entre le chef de l’Etat et le président du Parlement Rached Ghannouchi n’est guère pour des principes, mais plutôt pour des prérogatives ».
Gare à la vacance des portefeuilles régaliens
D’autre part, et ayant constaté le blocage dans le fonctionnement des institutions de l’Etat, la présidente du parti destourien mettait en garde contre toute vacance dans les portefeuilles ministériels régaliens. Et ce, « au moment où le pays est confronté aux menaces terroristes, ainsi que la propagation de l’épidémie de coronavirus ».
Passage en force pour « destituer le Président »
S’agissant de la polémique au sujet de l’élection des membres de la Cour constitutionnelle, elle affirmait que son bloc ne participera à la séance plénière du vote. Estimant que le mouvement Ennahdha opère un passage en force sur la création de cette juridiction pour « destituer le président de la République. Dans l’unique but de servir les intérêts des Khouenjiya », concluait Abir Moussi.
Concernant la motion de retrait de confiance au président de l’ARP, Rached Ghannouchi, la présidente du PDL a précisé qu’on parle de plus 90 signatures. Toutefois, elle exige que « toutes les parties signataires le fassent savoir publiquement. La semaine prochaine sera décisive pour le passage de la liste en séance plénière ».
Le PDL favorable à l’initiative du Quartet?
Par ailleurs, Moussi, qui s’était vigoureusement opposée à l’initiative de l’UGTT sur le Dialogue national, s’est dite prête à des solutions radicales pour sortir le pays de la crise, à travers « un dialogue profond ». Une allusion à l’initiative avancée par le Quartet parrain du dialogue national?
Enfin, l’oratrice annonçait que les partisans de son parti occuperaient les rues de manière « pacifique et légale », si la détérioration de la situation politique se poursuivait. Et qu’ils feront face aux « fascistes » et « dictateurs », en référence au parti Ennahdha. Avant de passer aux marches populaires, dans une forme d’escalade.
Alors, que faut-il, in fine, retenir de ce discours? Que, outre le langage parfois outrancier, Abir Moussi qui surfe sur une vague ascendante dans les sondages, a tenu un meeting plutôt électoral, où elle a tiré sur tout ce qui bouge. En omettant toutefois d’avancer des propositions concrètes pour sortir de la crise. Peut être se réserve-t-elle d’autres sorties à cet effet.