Lors de son allocution d’ouverture, hier jeudi, du premier Conseil des ministres du gouvernement Najla Bouden, le président de la République évoquait, tour à tour, plusieurs sujets. Tout d’abord, la haute idée qu’il se faisait de la souveraineté nationale. En fustigeant au passage les « traîtres à la Nation ». Lesquels ont sollicité l’ingérence étrangère dans les affaires internes de la Tunisie. Puis, Kaïs Saïed faisait allusion, du bout des lèvres, au dialogue national; mais à ses conditions. Explications.
Souveraineté nationale. La Tunisie est un pays libre et indépendant. Tel était le leitmotiv du président de la République, Kaïs Saïed. Il exprimait son opinion, lors de son allocution d’ouverture, hier jeudi 14 octobre, du premier Conseil des ministres du gouvernement Bouden.
Souveraineté et dignité
« Nous sommes conscients de notre dimension et des moyens dont nous disposons. Mais nous n’accepterons jamais de mettre la souveraineté de la Tunisie sur la table des négociations étrangères ». Ainsi déclarait le président de la République.
Et d’ajouter: « Nous n’avons peut-être pas de missiles intercontinentaux, mais nous avons une souveraineté intercontinentale. Nous plaçons notre souveraineté au dessus de tout, notre dignité avant tout. Il n’est pas permis à quiconque d’interférer dans nos affaires internes. La parole est au peuple et non à des capitales étrangères ou des traitres qui sollicitent l’étranger pour nuire à leur propre pays ». Voilà comment s’indignait le chef de l’Etat.
Kaïs Saïed : « Mécontentement de l’Etat tunisien »
Kaïs Saïed faisait allusion à la Commission du Congrès américain. Laquelle consacrait, hier jeudi 14 octobre, une séance de travail sur la Tunisie post-25 juillet, dont les « dérives présidentielles inquiètent les Etats-Unis ». Il évoquait également les « traîtres », sans toutefois les nommer expressément, qui se vantaient d’avoir contribué à torpiller la tenue du sommet de la Francophonie à Djerba. Rappelant à l’occasion que « les conventions onusiennes interdisent l’ingérence étrangère ».
En effet, Le président de la République Kaïs Saïed n’a pas hésité à convoquer, hier jeudi, l’ambassadeur des Etats-Unis, Donald Blome, pour faire part du « mécontentement après l’inscription de la situation en Tunisie à l’ordre du jour des travaux de la Commission des Affaires étrangères du Congrès américain ». C’est ce qui ressort d’un communiqué de la présidence Tunisienne.
Cependant, « le chef de l’Etat a souligné que les relations entre les deux pays resteront solides. En dépit des tentatives d’un certain nombre de Tunisiens de déformer la réalité de la situation en Tunisie. Et de trouver des interlocuteurs prêts à les écouter à l’étranger ». C’est encore ce qu’indique la même source.
Marzouki s’attire les foudres présidentielles
Chose promise, chose faite. Le Président a décidé de retirer à l’ancien président de la République, Moncef Marzouki son passeport diplomatique. « Vous savez comment certaines personnes sont parties à l’étranger pour supplier, afin de porter atteinte aux intérêts du pays. Je considère qu’il ne peut pas profiter de ce privilège, lorsqu’il parcourt le monde et rencontre des personnes pour nuire à la Tunisie ». Ainsi martèle-t-il.
En outre, Kaïs Saïed chargeait la ministre de la Justice, Leila Jaffel, d’ouvrir une enquête judiciaire à propos de ces agissements. Il les qualifie d’ailleurs « d’atteinte à la sûreté nationale ». Et quant aux individus qui sollicitent l’ingérence étrangère dans les affaires internes de la Tunisie de « traîtres à la Nation ».
Pour rappel, l’ancien président provisoire, Moncef Marzouki, n’avait pas caché, lors de son passage sur France 24, sa « fierté » d’avoir contribué à torpiller la tenue du Somment mondial de la Francophonie, à Djerba.
Un dialogue en trompe-l’œil
Sur un autre volet, le président de la République a prononcé, lors de son allocution d’ouverture du premier conseil des ministres du gouvernement, le mot magique de « dialogue national ». Pour préciser, tout en restant dans le vague total, qu’ « il y aura un dialogue, mais il ne sera pas semblables aux dialogues précédents. Il s’agit d’un dialogue avec le peuple tunisien, avec les jeunes tunisiens et le décret sera bientôt publié ».
De quoi doucher tout le monde. Le Président qui dispose de tous les leviers de l’Etat, qui détient en ses mains tous les pouvoirs, y compris celui de l’exécutif, va-t-il se résigner enfin à s’ouvrir sur les partis politiques qu’il honnit tant, ainsi que les organisations nationales, sans oublier la société civile?
Et puis que signifie le dialogue avec le peuple, notamment avec les jeunes? Quelle catégories de jeunes, où et comment, par quel mécanisme?
S’agit-il d’une énième consultation nationale sur les jeunes à l’instar de celle qui fut lancée par Ben Ali en 2009 et dont les résultats sont connus?