Lancé depuis 2019, le projet d’un livre traitant de l’histoire de la bière tunisienne Celtia a enfin abouti après le recul de la Covid 19. Et ce, avec la parution d’un très bel ouvrage publié à Woippy, Moselle, chez Indola Éditions, 121 pages, (Grand Format), en novembre 2021. Il s’intitule « Celtia Histoire d’une bière de Tunisie… De Luxembourg à Tunis ». Et il est rédigé par l’ami de toujours de la Tunisie, Paul Nicolas.
Paul Nicolas est natif de Nancy en 1951 et commandant de police à la retraite depuis 2006. Il débutait sa carrière professionnelle comme inspecteur au commissariat des Trois-Boulangers à Metz. Avant d’être affecté à la Direction Régionale des Renseignements Généraux de Lorraine. Son dernier ouvrage s’intéresse à la bière Celtia emblématique de la Tunisie.
Un auteur passionné par l’histoire de la Tunisie
Installé à Metz, très actif, grand voyageur et passionné d’histoire, il s’intéresse surtout à notre pays qu’il parcourt régulièrement depuis plus de 35 années. D’abord en solitaire, puis avec son épouse, Béatrice Nicolas, agent d’accueil à la cathédrale de Metz.
Après « Sidi Brahim des neiges, sur les traces du 4e Régiment de Tirailleurs Tunisiens », paru chez MC-Editions à Carthage en 2008, dans lequel il a rendu hommage aux anciens combattants tunisiens de la Seconde Guerre mondiale, Paul Nicolas avait publié en 2010 « La Ghriba, pèlerinage juif en terre d’Islam », éd. MC-Editions, Carthage, 2010, et « Ma vie de Flic » aux éditions Serpenoise à Metz en 2013.
Dans cet ouvrage, il retraçait sa carrière professionnelle de 32 ans (de 1974 à 2006). En décrivant plusieurs aventures et des faits divers inoubliables en Lorraine, entre autres. Tels que: la disparition de la voiture du célèbre agent d’espionnage James Bond; le rapt de la petite Valérie; Pierrot le fou; le vol du manteau du chanteur Joe Dassin; la campagne fiévreuse de la ministre Alice Saunier-Seïté contre Jean-Louis Masson aux législatives de 1978; le Sommet franco-africain de Vittel en 1983; la visite du Pape, Jean Paul II à Metz en 1988, etc.
Suivront, en 2015 « Les Poilus d’Afrique du Nord » (MC-Editions), ouvrage qui retrace l’épopée des combattants musulmans tombés sur les théâtres d’opérations de la Grande Guerre. Puis, en 2017 « Tunisiens et Tunisiennes de Lorraine » (Indola Editions), où l’auteur valorise les liens qui unissent les deux rives de la Méditerranée. Et ce, à travers une galerie de portraits d’hommes et de femmes.
L’ouvrage que nous présentons est donc sa sixième publication. Et sa quatrième à caractère historique, consacrée à son deuxième pays, la Tunisie, par ce « semi- tunisien », en l’occurrence Paul Nicolas.
Il est également l’auteur de deux communications scientifiques exposées dans des colloques et journées d’études historiques internationales. La première présentée sur trois étapes, à l’occasion du centenaire de la Grande Guerre intitulée: « La mobilisation au Maghreb et en Afrique subsaharienne dans la Grande Guerre ». Tout d’abord à Casablanca en 2014, puis à Tunis les 28 et 29 mai 2015 à l’hôtel Majestic et à Gammarth Center, et enfin à Paris en septembre 2016.
Quant à la deuxième, ayant pour titre: « Le Colonel Mollot à travers le témoignage de sa famille », elle a été présentée aux travaux de la journée d’étude tenue sur proposition de notre ami passionné d’histoire, l’ingénieur à la retraite, Mohamed Noureddine Dhouib (Président de l’Association du Patrimoine de Zarzis). Avec la collaboration de la Maison de la culture, des jeunes du club Zita et la Maison de la jeunesse. Et ce, à Remada au mois de mars 2019, à l’occasion du soixantenaire de la bataille de Remada (23-25 mai 1958). Dont les actes sont parus dans un petit ouvrage collectif en français et en arabe, préfacé par Mohamed Noureddine Dhouib. Ce dernier évoque des péripéties de cette bataille, vue du coté Bordj, intitulé « Remada 1958: Le destin tragique de la famille Nebhani », SOTUPA, Tunis 2021, 160 pages.
Les composantes de l’ouvrage
Précédé par un proverbe tunisien: « La rencontre des hommes vaut des trésors » (معرفتك في الرجال كنوز), préfacé par Hervé Marziou (biérologue de renom) et succédé par un Avant propos, le développement est de près d’une centaine de pages reparties comme suit:
- 10 Chapitres: Les origines de la bière/ La bière et ses composants: cuisine ou alchimie ?/ 1889: Naissance d’une belle aventure humaine/ Le groupe SFBT/ Dans les entrailles de la Brasserie de Bab Saâdoun/ Celtia ; un amour de bière/ Les Tunisiens et la bière/ La bière une ode à la gastronomie/ Mohamed Bousbia, un grand capitaine d’industrie/ Une histoire se termine… mais l’aventure humaine se poursuit.
- L’ouvrage contient aussi 05 Annexes: Portrait Joseph Baldauff/ Portrait Maurice Gripon/ Portrait Robert Palomba/ Domaine Shadrapa/ Notice entreprise SFBT/ Publicités et objets brassicoles, un glossaire technique: Les mots de bière, une bibliographie exhaustive: Bibliographie – Sources et enfin des Remerciements.
Un des avantages de l’ouvrage, c’est qu’il contient un trésor iconographique composé de plus de 200 photos, d’affiches, de cartes postales, pancartes… Elles sont rares, voire même inédites (en couleurs et en noir et blanc). Ainsi que des coupures de presse de l’époque, des différentes marques de bières tunisiennes (artisanale et industrielle)…, exposées sur papier couché de haute qualité.
Ces photos, avec leurs commentaires, ainsi que les textes joints, constituent des documents historiques de première main. Et ce, aussi bien pour les historiens, que pour les chercheurs en science brassicole dans le monde en général et en Tunisie en particulier, depuis l’Antiquité jusqu’à sa production actuelle.
Les sources de l’ouvrage
L’auteur a puisé sa matière première sur l’industrie brassicole en Tunisie dans des sources multiples. Il a tout d’abord commencé par les sources archivistiques publiques: Les Archives Nationales de Tunisie; Les fonds de la Résidence Générale de France en Tunisie; du Quai d’Orsay déposés à l’Institut d’Histoire Contemporaine de la Tunisie. Mais aussi dans des archives privées: les archives de la SFBT (la Société de Fabrication des Boissons de Tunisie); et de la Brasserie située à Bab Saâdoun).
Ensuite, il s’est référé aux textes officiels: le JOT et le JORF; les périodiques de l’époque, paraissant aussi bien en France qu’en Tunisie. Enfin, une bibliographie sélective et une très riche Webographie, pour le recueil des photos et affiches…, qui figurent dans l’ouvrage.
Cependant, Paul Nicolas ne s’est pas contenté de toute cette mine d’informations. Il est parti à la rencontre de quelques établissements et consommateurs de cette « Tunisie plurielle », qu’il affectionne particulièrement.
A cet égard, il a tenu à visiter les installations de la brasserie, à rencontrer quelques représentants de la SFBT, devenue au fil des décennies un groupe agroalimentaire de premier plan en Tunisie et s’entretenir avec le « Capitaine » de la SFBT, M. Hamadi Bousbia. D’ailleurs, lors de sa dernière visite dans « son deuxième pays », fin 2021, il a tenu à lui rendre visite. Et lui offrir un exemplaire dédicacé de son ouvrage, un geste qui a énormément consolé M. Bousbia!
La langue et le style de l’ouvrage
Pour servir le sujet dans ses grandes lignes, l’ouvrage est rédigé dans un style à la fois littéraire et historique, simple, attractif, vigoureux, concis et surtout dépourvu de détails inutiles. Quant à la langue française, elle est comme toujours correcte, riche, dont les termes et les noms renvoient automatiquement les lecteurs à l’histoire, la société, la gastronomie tunisiennes… Durant une belle époque, où cohabitaient pacifiquement les Tunisiens (Musulmans et Juifs) avec les Européens de toutes nationalités (Français, Italiens, Maltais, Espagnols…) dans les lieux publics. Que ce soit les rues et boulevards, jardins, stades, plages et corniches, salles de cinéma, théâtres… Et bien entendu aux cafés, bars et bistrots !
’Celtia’ Reine incontestée de la bière en Tunisie
Selon Paul Nicolas, la marque ’Celtia’, produite par la Société de fabrication des Boissons de Tunisie (SFBT) depuis 1951, sous l’impulsion de M. Robert Palomba, est la suite d’une longue histoire. En effet, elle a pris sa source en 1889, rue d’Espagne à Tunis, près du Marché central. Avec la construction d’une petite fabrique de glace à l’initiative d’un jeune centralien luxembourgeois, Joseph Baldauff, tombé sous le charme de ce pays. Une activité qu’il développera quelques années plus tard dans des installations à Bab Saâdoun pour une activité brassicole.
En 1979, après trois décennies à la tête de SFBT, Robert Palomba, français d’origine italienne, quitte la Tunisie pour s’installer en France. A la recherche d’une personne qui pourrait le remplacer et surtout qui veillera à la prospérité et la continuité de son entreprise, il s’adresse à l’un de ses amis, Mohamed Bousbia (dit Hamadi), le Directeur Général de la Banque centrale de Tunisie (du 12/03/1971 à 12/07/1980). Celui-ci acceptera de prendre la relève et tenter le monde des affaires pour devenir dès lors, un des « Grands » de l’industrie tunisienne jusqu’à nos jours !
Au terme de son ouvrage, Paul Nicolas rappelle que: «… De nos jours, curieusement, il n’est pas rare de remarquer dans quelques établissements populaires une réclame vantant ’’La Société Frigorifique et Brasserie de Tunis’’, fondée en 1889 sous le nom de ’’Baldauff et Cie’’, qui « œuvre depuis des décennies pour faire de Celtia une bière de qualité ». Il ajoute: « Les mots de cette affiche vieillotte, quelque peu défraichie, que l’on devine à peine au milieu d’autres plus récentes, évoquent l’attachement des Tunisiens à cette boisson, depuis sa création, et à la notoriété qu’elle représente. Ils expriment avec justesse la gratitude et le souvenir d’une histoire qui unit Tunis et Luxembourg… ». (page 81).
En guise de conclusion, « Celtia Histoire d’une bière de Tunisie… De Luxembourg à Tunis » de Paul Nicolas, est à la fois un livre d’histoire, et d’industrie brassicole. Il est à lire, regarder, consulter et surtout posséder dans sa bibliothèque par tout historien et chercheur. Non seulement en Tunisie, mais également dans les pays des deux rives de la Méditerranée!