Lors de son passage sur l’antenne d’une radio privée, l’expert en économie Radhi Meddeb a passé en revue les grands dossiers de l’heure. Et notamment les négociations en cours avec le FMI. En proposant des pistes pour la résolution de la crise. Une note d’espoir dans un océan de pessimisme.
En ces temps de crise, où les Cassandre nous annoncent inlassablement que notre pays est au bort du gouffre, est-il écrit au ciel que le déclin de notre économie soit inéluctable? Non, répond l’expert en économie, Radhi Meddeb, l’une des rares compétences qui croient qu’il faille sauver le soldat Tunisie et qu’il existe toujours une lueur d’espoir au bout du tunnel. Il suffit d’y croire et surtout de se retrousser les manches.
Le miracle tunisien
Ainsi, a-t-il remémoré l’époque faste de Hédi Nouira, Premier ministre de Bourguiba. Pour rappeler qu’en 1972, la Tunisie réalisa le taux astronomique de 17% de croissance. Et ce, grâce au climat de confiance instaurée à l’époque par ce gouvernement suite aux éprouvantes années de collectivisme forcé, couplé d’une terrible sécheresse. Surtout à l’ouverture sur l’initiative privée. « A l’époque, tout le monde avait son petit projet et se battait pour le réaliser », se souvient Rhadi Meddeb. Il était l’invité d’Elyes Gharbi, lundi 21 février, sur les ondes de Mosaïque FM.
Une économie à bout de souffle
Actuellement, a-t-il indiqué, l’économie nationale repose sur le secteur privé « qui est éreinté depuis 2011 ». Particulièrement à cause de la disparition du marché libyen « qui constituait auparavant une bouffée d’oxygène pour les PME ». Il déplore à cet égard le manque d’ouverture de l’économie tunisienne; ainsi que ses méthodes « conservatrices et traditionalistes ». Soulignant au passage l’importance « du retour de la confiance » pour la relance de l’économie.
Promouvoir le microcrédit et l’ESS
Or, pour booster l’économie nationale, le fondateur et PDG groupe COMETE Engineering (Tunisie) croit dur comme fer à l’importance du microcrédit qui fait vivre plus de six cents mille familles et trois millions de Tunisiens. « Là où l’économie nationale a régressé de 8% en 2020, le secteur du microcrédit a progressé de 30%, », fait-il observer. Et de marteler: « Il faut promouvoir ce créneau et s’ouvrir sur toutes les initiatives, toutes les idées et tous les projets, même modestes, pour redynamiser l’économie […] Toutes les études montrent un besoin d’accès aux microcrédits », conclut-il.
D’autre part, il insiste sur le rôle de l’économie sociale et solidaire (ESS) « qui ne représente que 1% du PIB. Alors qu’elle a une importante place ailleurs, avec 10% en France et 20% dans les pays scandinaves ». Mais, a-t-il déploré, « la loi régissant l’économie sociale et solidaire, adoptée depuis deux ans, n’a pas été activée jusque-là. Etant donné qu’aucun décret d’application n’a été adopté ».
Revenant sur le secteur public, l’économiste considère qu’il est dans « une situation affligeante ». Et d’insister: « Indépendamment de la privatisation et de la recapitalisation, plusieurs entreprises publiques, à l’instar de la STEG et Tunisair, constituent aujourd’hui une lourde charge pour l’Etat et les banques publiques ». Tout en ajoutant que ces entreprises ont impérativement besoin « de restructuration et de repositionnement stratégique ».
Oui pour les réformes, mais progressives
Par ailleurs, sollicité sur le recours au FMI, Radhi Meddeb pense que notre pays n’a pas d’autres choix. Il déclare en effet: « Avec le besoin de 14 milliards en termes de financements extérieurs, l’accord avec le FMI est la clef qui permettra à la Tunisie d’accéder à d’autres bailleurs de fonds. »
Et que penser des réformes nécessairement douloureuses exigées par le FMI? « Nous n’avons pas le choix, d’où la nécessité d’adopter de telles réformes. Mais d’une manière progressive. On ne peut passer du jour au lendemain, d’une baguette à 190 millimes, à une baguette à 360 ou 400 millimes », a-t-il averti.
Et de conclure: « Nous devons avancer à petits pas… Les changements radicaux auront des conséquences désastreuses… Nous n’avons pas d’autres choix que d’appliquer les recommandations du FMI, mais en trouvant la bonne formulation ».
Même constat de la part du président de la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie (CONECT), Tarek Cherif. Ainsi, celui-ci appelait, lundi 21 février 2022 au micro de La Matinale de Myriam Belkadhi sur Shems FM, à exposer d’abord les problématiques avant de proposer des réformes, pour convaincre de leur nécessité. « Il faut aussi de la pédagogie pour expliquer au peuple que ces réformes sont nécessaires ». Rappelant à l’occasion qu’il est en faveur de la révision du système des subventions, en ciblant essentiellement les « catégories sociales qui en ont le plus besoin ».
Bref, de l’art de faire avaler la pilule amère… accompagnée d’une douceur.