« Après discussions avec la ministre des Finances pour mettre les moyens à l’entrée en vigueur de l’économie sociale et solidaire (ESS), il a été convenu de consacrer un budget de 30 millions de dinars sur trois ans. Et ce, à raison de 10 millions de dinars par an à partir de 2022″. C’est ce qu’a annoncé vendredi 25 février le ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle et porte-parole du gouvernement, Nasreddine Nsibi, lors d’une conférence organisée par l’Atuge sur le thème « Entreprendre dans le cadre de l’économie sociale et solidaire en Tunisie ».
Interpellé sur l’état des lieux et le degré d’implication de l’Etat dans l’ESS, Nasreddine Nsibi a souligné que l’économie sociale et solidaire est aujourd’hui une expérience concrète et un projet d’avenir.
« Pour le gouvernement, l’ESS est un dossier ouvert depuis ma prise de fonctions. J’ai estimé que la loi telle que adoptée, et qui n’est pas encore entrée en application, nécessite quelques ajustements », ajoute le ministre.
Pour rappel, la loi tunisienne définit l’ESS comme un modèle économique comprenant toutes les activités économiques ayant des objectifs sociaux liés à la production, la distribution, l’échange, la commercialisation, la consommation des biens et services par des institutions sociales et solidaires. Et ce, pour répondre aux besoins communs de leurs membres et à l’intérêt économique et social général. La loi prévoit aussi la création de banques coopératives, un statut particulier des entreprises ESS, des structures d’accompagnement et un label ESS.
Les décrets d’application tardent à venir
Nasreddine Nsibi a reconnu qu’une certaine faiblesse a été identifiée à cause de la difficulté rencontrée dans la rédaction des décrets d’application. Pour faire face à cette faiblesse, il a été proposé de modifier cette loi dans l’objectif d’une refonte approfondie.
Ainsi, un projet de loi et des textes d’application ont été proposés à la présidence du gouvernement. Il s’agit d’un équilibrage et non pas d’une refonte globale. Selon le ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, la présidence du gouvernement se penche sur la collecte des avis des différents départements ministériels. « Ce nouveau projet de loi sera examiné au plus tard au mois d’avril 2022 en conseil des ministres. L’ESS peut contribuer jusqu’à 10% du PIB et créer entre 40 et 50 mille emplois directs par an », estime le ministre.
S’agissant des contraintes externes et internes qui fragilisent le fonctionnement de cette loi, le ministre a fait savoir que des projets pilotes ont eu droit à un financement et un accompagnement. Ce qui a permis, sans une réglementation spécifique et particulière, de mettre en place des entreprises dans l’ESS qui fonctionnent et réussissent.
L’ESS, c’est quoi ?
Contrairement à l’économie classique, dans l’ESS, il faut tout centrer sur l’humain. Pour Nasreddine Nsibi, l’ESS a un potentiel important en matière de création d’emplois et de richesse. Elle peut être rentable sans entrer dans la logique traditionnelle de la rentabilité.
« Une entreprise ESS peut générer 4 à 5 salaires sans pour autant avoir des charges d’exploitation. Il faut donc des financements à caractère spécifique », souligne Nasreddine Nsibi, qui a pointé du doigt l’absence des structures d’accompagnement parce que, dit-il, les projets ESS nécessitent plus d’accompagnement que les autres projets classiques pour garantir leur pérennité.
L’ESS met aussi l’accent sur le développement humain dans des zones rurales où l’investissement classique n’est pas évident. C’est pourquoi, dans certaines régions intérieures de la Tunisie, l’ESS peut apporter des réponses concrètes en termes de création de richesse, d’entrepreneuriat et de développement axé sur le capital humain.