L’Agence de notation Fitch Ratings estime que le gouvernement tunisien et l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) pourraient parvenir à un consensus sur un ensemble de réformes économiques. Et ce, dans l’intérêt de débloquer le financement du FMI. Ainsi que pour soutenir la position de financement extérieur du pays.
L’agence Fitch Ratings ajoute que les tensions sur la future structure constitutionnelle entravent la conclusion d’un tel accord. De même qu’elles augmentent les risques par rapport à la conclusion d’un programme de réformes entre la Tunisie et le FMI; et ce, d’ici la fin du troisième trimestre de 2022. C’est ce qu’a ajouté l’Agence dans une note publiée lundi.
Dans le cadre d’un scénario sans réformes, la Tunisie pourrait réclamer le recours du Club de Paris pour le traitement de sa dette. Et ce, avant de devenir éligible à un financement supplémentaire du FMI. Avec des implications pour les créanciers du secteur privé indique aussi Fitch.
« Malgré la montée des risques financiers et politiques, nous nous attendons toujours à ce que la Tunisie présente un plan de réforme crédible au FMI. Avec un financement important des créanciers publics décaissé, d’ici la fin de l’année ».
L’annonce par l’UGTT, le 23 mai, de son refus de participer au dialogue national proposé par le président Saïed pour soutenir les réformes politiques et son intention d’organiser une grève du secteur public a mis en évidence les divergences de vision sur le processus de réforme, a-t-elle rappelé.
L’adhésion de l’UGTT renforcerait la crédibilité d’un programme de réforme économique et augmenterait considérablement, la probabilité d’un accord de financement avec le FMI, a expliqué l’Agence. Et d’ajouter que le président Kaïs Saïed reste populaire. Mais faire adopter des réformes politiques et économiques sans le soutien de l’UGTT serait difficile.
« Nous pensons que l’Union (UGTT) conditionnera son soutien aux réformes économiques à la préservation de son rôle politique influent dans le cadre du nouvel ordre institutionnel ». Néanmoins, il existe un risque que les réformes ne soient pas convenues à temps, pour garantir un programme du FMI avant que les tensions sur les liquidités externes ne s’aggravent; même si l’UGTT finit par les soutenir.
L’Agence a rappelé les derniers évènements survenus dans le pays. Avec notamment les préparatifs pour le référendum sur une nouvelle constitution qui devrait avoir lieu, au mois de juillet. Ainsi que les élections législatives prévues fin 2022.
Le FMI a déclaré en 2021, que la dette de la Tunisie deviendrait insoutenable à moins qu’un programme de réforme solide et crédible ne soit adopté avec un large soutien.
Un déficit du compte courant de 8,4% du PIB en 2022
La Tunisie affichera un déficit du compte courant de 8,4% du PIB en 2022, contre 6,3% en 2021, selon les prévisions de Fitch.
Les décaissements récents de la Banque mondiale (BM), de l’Union européenne (UE) et d’Afreximbank ont atténué l’impact à court terme sur la position extérieure de la Tunisie. Et ce, en termes d’augmentation des sorties du compte courant causées par la hausse des prix mondiaux des matières premières (pétrole et blé), en raison de la guerre en Ukraine.
La hausse des prix à l’importation a également aggravé les pressions inflationnistes et alourdi la facture des subventions du gouvernement, rappelle Fitch Ratings. Par conséquent, le déficit budgétaire se creusera à 8,5% du PIB en 2022; contre 7,8% en 2021 ».
Le 17 mai, la Banque centrale de Tunisie (BCT) a relevé son taux directeur de 75 points de base, à 7%. « Ce qui pourrait contribuer à « refroidir » la demande. Mais il est peu probable que la Tunisie attire beaucoup d’investissements privés internationaux, compte tenu des défis économiques auxquels le pays est confronté.
Fitch avait déjà abaissé la note de la Tunisie à « CCC » de « B- »
En mars 2022, Fitch abaissait la note de la Tunisie à « CCC » de « B- ». Et ce, en raison de risques accrus de liquidité budgétaire et externe après de nouveaux retards dans la conclusion d’un nouvel accord avec le FMI à la suite de changements politiques en juillet 2021.
En l’absence d’un accord avec le FMI, qui est nécessaire pour accéder à l’aide budgétaire de la plupart des créanciers publics, on s’attendrait à ce que les réserves internationales de la Tunisie s’érodent progressivement (de 8,4 milliards de dollars fin avril 2022) et que le dinar se déprécie, lit-on dans la note.
Lundi le président de la République Kaïs Saïed a rejeté lors de sa rencontre avec le ministre des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, Othman JerandiIl, toute forme d’ingérence dans les affaires internes de la Tunisie » .
« La souveraineté de la Tunisie ne peut, en aucun cas, faire l’objet de surenchères », a martelé le chef de l’Etat. Tout en dénonçant « les positions de la Commission de Venise concernant la situation en Tunisie. Notamment en ce qui concerne l’Instance des élections et le référendum du 25 juillet prochain.
Vendredi dernier, la commission de Venise a émis, à la demande de la délégation européenne en Tunisie, un « avis urgent » sur le cadre constitutionnel et législatif concernant le référendum du 25 juillet et les élections législatives du 17 décembre, annoncées par le président de la République, Kaïs Saïed. Notamment sur le décret-loi n°2022-22 amendant et complétant la loi organique n°23 sur l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE).
Avec TAP