Le prix du pétrole a à peine bougé depuis que l’OPEP+ a accepté de commencer à pomper plus de barils. Le contrat sur le Brent pour livraison en août frôle les 120 dollars. C’est un niveau plus élevé que celui enregistré avant la réunion capitale des principaux producteurs.
Les décisions prises sont le fruit de mois de pression de la part de la Maison-Blanche sur l’Arabie saoudite. Riyad a cédé. Elle a convenu avec les autres producteurs d’accélérer la production de pétrole. Reportant aux mois de juillet et d’août les augmentations de l’offre prévues pour septembre. Les augmentations mensuelles seront alors d’environ 650 000 barils par jour.
L’objectif est d’enrayer une reprise du marché pétrolier qui menace la croissance économique mondiale et a poussé les prix de l’essence à des sommets historiques partout dans le monde. Pour Joe Biden, c’est un casse-tête politique, à quelques mois des élections de mi-mandat au Congrès.
Offre toujours limitée
Mais les chiffres réels sont autres. Le volume du nouveau pétrole à livrer est bien inférieur à ce que promet l’accord. Sur le total, 432 000 barils par jour de pétrole supplémentaire étaient déjà prévus chaque mois, et donc intégrés dans le marché.
De nombreux petits producteurs n’ont pas non plus respecté leurs quotas de production ces derniers mois. Au total, la hausse effective ne serait que de 355 000 barils par jour au cours des deux prochains mois.
Cette somme est minime comparée aux 3 millions de barils quotidiens d’approvisionnement en pétrole qui pourraient être perdus en provenance de la Russie. Et ce, au cours du second semestre de l’année, avec le renforcement des sanctions.
Les États-Unis voulaient davantage parce que la croissance de l’offre des autres producteurs a été également tiède, notamment au Texas. Les fournisseurs américains de schiste, dont la production galopante a contribué à contenir les prix du pétrole ces dernières années, restent réticents à accélérer le forage de nouveaux puits. Ils consacrent plutôt la manne de la hausse des prix aux dividendes et aux rachats d’actions.
Les efforts déployés par les États-Unis pour encourager les exportations de brut du secteur pétrolier vénézuélien sanctionné n’ont pas encore porté leurs fruits.
Un nouvel accord nucléaire avec l’Iran permettrait à son pétrole de revenir sur le marché reste lointain. Demander plus de pétrole canadien serait politiquement périlleux pour Biden, étant donné sa décision d’annuler un permis pour l’oléoduc controversé Keystone XL. Quels qu’ils soient, les nouveaux approvisionnements en provenance de l’un de ces pays mettraient des mois à arriver.
Demande soutenue
En même temps, la consommation continue d’augmenter. Lorsque l’économie chinoise se remettra à fonctionner, elle pourrait encore s’envoler. Les estimations parlent d’une demande quotidienne mondiale de 100,3 millions de barils contre 97 millions en 2021.
Par ailleurs, à l’approche de la saison estivale de conduite aux États-Unis, la demande des automobilistes reste forte, malgré une hausse de 60% du prix de l’essence. Et lorsque les Américains ne consomment pas de carburant, les raffineurs l’exportent vers un marché mondial également assoiffé et inquiet des effets des sanctions contre la Russie, premier exportateur mondial de produits raffinés.
Dans ce contexte de raréfaction des approvisionnements et de forte demande de pétrole de la part des consommateurs, nous assistons à ce que certains considèrent comme le début d’un cycle haussier des prix des produits de base.
La fièvre des prix ne se brisera probablement que lorsque la demande commencera à craquer. Entre temps, les Saoudiens ont signé une victoire politique puisqu’ils ont pu continuer à profiter d’un contexte favorable aux prix. Tout en retrouvant l’accord historique pétrole-stabilité-sécurité avec les Américains.