Les instruments de gestion de la dette publique reposant sur la technique des swaps sont multiples et ne datent pas d’aujourd’hui. La réflexion a démarré dans les années 80, au lendemain de la crise de la dette qui a secoué les pays d’Amérique Latine : Debt-for-equity swap (Chili,1985) ; Debt-for-nature swap (Bolivie, 1987)… Plus récemment, la multiplication des risques liés aux changements climatiques et la montée des vulnérabilités sociales ont boosté les formules de swaps liés aux SDGs (United Nations Sustainable Development Goals – Objectifs de Développement Durable – ODD ): Debt-for-climate (Les Seychelles, 2015); Debt-for-education (Salvador, 2005-2013)…
L’idée principale de l’instrument Climate/SDGs debt swap (conversion de dette Climat/ODD) est qu’au lieu de continuer à honorer un service de la dette externe en devises, étouffant pour les dépenses d’investissement et les dépenses sociales, le pays débiteur pourrait effectuer des paiements en monnaie domestique pour financer des projets résilients au climat, à travers des accords de collaboration entre débiteurs, créanciers et donateurs. Il s’agit d’un mécanisme win-win pour tous les intervenants.
Pour le pays débiteur : alléger la charge du service de la dette ; plus d’investissements dans le renouvelable ; accélérer le processus des ODD; augmenter la création d’emplois et réduire ainsi les inégalités…
Pour le créancier : accroitre les décaissements au titre de l’aide publique pour le développement et le financement du renouvelable ; plus d’implication pour atteindre les accords de Paris et les ODD; réduire le risque de défaut; améliorer la situation socio-économique et garantir la stabilité sociale…
Par ailleurs, pour le donateur : mobiliser davantage de ressources pour les projets résilients au changement climatique et aux actions visant les ODD; limiter les coûts de transaction générés par les engagements avec les acteurs domestiques ; accroitre les opportunités du partenariat public-privé dans le secteur du renouvelable/ODD.
Ainsi, le Climate/SDGs debt swap demeure une opportunité fort intéressante pour la Tunisie. Toutefois, la réussite de son implémentation exige un certain nombre de préalables. Il s’agit de :
-L’assainissement du climat des affaires;
-Bonne gouvernance administrative;
-Efficacité des dispositifs de suivi et de contrôle;
-Stabilité politique et institutionnelle;
-Implication de la société civile…
Bref, avec une dette insoutenable, la Tunisie a tout à gagner en prenant le chemin des solutions économiques innovantes, au lieu de continuer à sombrer dans des tergiversations constitutionnelles polluantes.
(Cet article a été publié dans le numéro 847 de L’Economiste Maghrébin du 22 juin au 6 juillet 2022- Disponible dans les kiosques).