Un cycle de resserrement monétaire se confirme dans les économies avancées. Les poussées inflationnistes, observées au lendemain de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ont fini par forcer la Federal Reserve américaine à accélérer le rythme de hausse de son principal taux directeur (+75 pb) et à imposer à la BCE la remontée de son taux directeur (+ 50 pb) après une longue période de ZIRP (Zero Interest Rate Policy).
Un resserrement monétaire qui fait frémir les marchés, surtout du côté européen. Primo, le creusement de l’écart entre les taux longs italien et allemand pourrait devenir pénalisant pour le refinancement du Trésor italien et probablement une source d’insoutenabilité de sa dette. Un pays dont la croissance potentielle est la plus faible de la zone Euro, supportera
mal la hausse du coût de financement.
Secundo, depuis la crise ukrainienne, les autorités monétaires européennes se sont retrouvées face à un arbitrage difficile entre la lutte contre l’inflation et le soutien à la
croissance. L’entrée dans ce cycle de hausse des taux confirme que la BCE a tranché en faveur de l’inflation. Or, cette remontée des taux pourrait alimenter le risque de stagflation dans la zone Euro.
Enfin, plus les taux obligataires divergent (s’écartent du taux allemand), plus les placements en euro demeurent moins attractifs pour les investisseurs internationaux. Une situation qui nourrit le risque d’éclatement de la zone et qui sera davantage pénalisante pour la monnaie unique face au dollar.
Quelles sont les retombées de ce durcissement monétaire sur l’économie tunisienne ?
Une récession qui frappe la zone Euro serait néfaste aussi bien pour les exportations tunisiennes que pour les revenus du tourisme et les transferts de la diaspora. Pour une économie fort dépendante du financement étranger, la hausse des taux d’intérêt des principales devises pourrait durcir les conditions de refinancement non seulement sur les marchés, mais aussi pour les prêts multilatéraux et bilatéraux. Toutefois, malgré la hausse,
les taux du marché obligataire demeurent à des niveaux faibles (2.7% pour le T-Bond US, 0,85% pour le Bund allemand…). Cependant, le bât blesse du côté du spread qui dépasse les 3000 pb et qui ne pourrait baisser qu’en présence d’une réelle détermination d’assainir les finances publiques, d’imposer la bonne gouvernance dans les entreprises publiques, et de rénover un dispositif réglementaire étouffant pour l’initiative privée.
Article paru au magazine de l’Economiste Maghrébin N° 850- du 3 au 31 août 2022