Le travail c’est la santé dit-on, c’est aussi un acquis et un droit auquel chacun de nous aspire. Le travail est un levier de réalisation de soi et d’épanouissement personnel lorsque celui-ci répond aux besoins de l’individu. Cette source d’accomplissement peut fréquemment devenir souffrance pour le travailleur et le mettre en difficulté.
Partout dans le monde, les travailleurs, les familles, les entreprises et des économies entières ressentent l’impact des problèmes de santé mentale, qu’ils soient ou non causés par le travail.
La question de la santé mentale en milieu de travail mérite d’être posée si bien que, compte tenu de son importance, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Organisation internationale du travail (OIT) ont appelé à des mesures concrètes pour répondre aux problèmes de santé mentale dans la population active.
Outre leur impact négatif sur la qualité de vie et le fonctionnement des travailleurs, les problèmes de santé mentale au travail ont un coût économique considérable. Selon les estimations, pas moins de 12 milliards de journées de travail sont perdues chaque année pour cause de dépression ou d’anxiété, ce qui coûte près de mille milliards de dollars à l’économie mondiale.
Les risques psychosociaux peuvent par ailleurs causer ou aggraver des problèmes de santé physique. Par exemple, en 2016, on estime que 745 000 personnes dans le monde sont décédées d’un accident vasculaire cérébral et d’une cardiopathie ischémique après avoir travaillé 55 heures ou plus par semaine. Bien que des facteurs de risque psychosociaux puissent être présents dans tous les secteurs, les situations de travail communes à certaines professions ont tendance à augmenter le risque d’exposition et une probabilité plus élevée de problèmes de santé mentale est observée. En effet, les professions qui comportent une charge émotionnelle élevée ou qui exposent l’individu à des événements potentiellement traumatisants, tels que les métiers de santé et d’urgence, sont à risque très élevé de problèmes de santé mentale. Les travailleurs occupant des emplois mal rémunérés, peu gratifiants ou précaires, ou travaillant isolément sont également susceptibles d’être exposés de manière disproportionnée à des risques psychosociaux, compromettant leur santé mentale. Les travailleurs qui peuvent être plus exposés aux risques psychosociaux en raison de facteurs liés à leur situation professionnelle sont les migrants, les travailleurs domestiques, les travailleurs occasionnels et ceux qui travaillent dans l’économie informelle.
Pourtant moins palpables que d’autres facteurs attachés à des problèmes de santé mentale liés au travail, l’intimidation et la violence psychologique sont les principales plaintes inhérentes au harcèlement au travail. Elles ont un impact négatif sur la santé mentale et discuter de la santé mentale – ou la révéler – reste un tabou dans les milieux professionnels du monde entier. « Comme les gens passent une grande partie de leur vie au travail, un environnement de travail sûr et sain est essentiel. Nous devons investir pour construire une culture de prévention autour de la santé mentale au travail, remodeler l’environnement de travail pour mettre fin à la stigmatisation et à l’exclusion sociale, et faire en sorte que les employés souffrant de troubles mentaux se sentent protégés et soutenus », a déclaré Guy Ryder, directeur général de l’OIT. Il est possible de repenser les environnements de travail, en optant pour des conditions plus favorables, en luttant contre la stigmatisation et la discrimination, en coordonnant des approches multisectorielles et participatives. Renforcer les efforts de sensibilisation, les compétences et les opportunités pour reconnaître et agir tôt sur les problèmes de santé mentale sont de merveilleux leviers pour protéger et promouvoir la santé mentale de tous les travailleurs.
La santé au travail est un droit, mais jusqu’à présent, elle ne semble pas être au premier plan en termes de priorité.
Article paru dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 854 du 12 au 26 octobre 2022