Pendant des décennies, la Chine a été le moteur de la croissance mondiale. En fait, à partir de la grande crise financière (GFC) de 2007-09, y compris la période pré et post-pandémique, la Chine a été responsable de 37% de l’expansion économique mondiale totale. Rien que l’année dernière, la croissance de la Chine a ajouté au monde un montant égal au PIB total de la France, soit plus de 2 800 milliards USD. Il est important de noter que l’expansion de la demande globale chinoise a un effet multiplicateur élevé, qui se répercute souvent sur les prix des produits de base, les marchés émergents et les autres économies ouvertes.
Cependant, au cours des derniers trimestres, des facteurs internes ont contribué à un fort ralentissement économique en Chine. Ce ralentissement est dû à la politique du « zéro covid », qui a entraîné un confinement dans les villes chinoises de niveau 1, des restrictions sur les prêts bancaires accordés au secteur immobilier surendetté et des mesures réglementaires agressives dans tous les secteurs. En conséquence, la croissance de la Chine au deuxième trimestre a été stagnante et la pire performance économique depuis des décennies a contribué à seulement 4% de la croissance mondiale totale pour la période.
Compte tenu de l’importance de la Chine pour la croissance mondiale, ainsi que du récent ralentissement de l’économie du pays, il n’est pas surprenant que les investisseurs, les économistes et les décideurs politiques aient suivi de près le Congrès national du Parti communiste chinois (PCC), qui se tient deux fois par décennie, afin de trouver des indices sur ce que sera l’avenir du géant asiatique. Le Congrès national du PCC a assuré au président Xi Jinping un troisième mandat de cinq ans à la tête de la Chine. Il a également permis à une nouvelle génération de fonctionnaires d’accéder à des postes clés au sein du PCC.
Selon nous, le Congrès a encore ratifié le 14e plan quinquennal de la Chine, approuvé il y a deux ans en 2020. Ce plan, qui repose sur l’idée d’une « double circulation », met l’accent sur la croissance des exportations (circulation internationale) et l’expansion de la demande intérieure, alimentée principalement par la hausse de la consommation (circulation interne). L’idée est que la « double circulation » soutiendrait, stimulerait et renforcerait la base manufacturière du pays, qui est le moteur de la réussite du développement futur, selon les dirigeants chinois.
La bonne exécution du programme de « double circulation » est essentielle pour que la Chine maintienne des taux de croissance élevés – supérieurs à 4 % – et dépasse les États-Unis en tant que première économie mondiale d’ici la prochaine décennie. Le Congrès a donc décidé de se concentrer sur deux domaines majeurs pour mettre en œuvre le programme de « double circulation », qui nécessite toutefois des engagements politiques et fiscaux importants.
Premièrement, la Chine devra investir massivement dans la science, la technologie, la recherche et le développement au niveau national, afin d’accroître l’autonomie et l’auto-amélioration. Ce point est devenu particulièrement important et urgent à la suite des récents événements géopolitiques de ces dernières années.
Depuis la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, le renforcement des contrôles à l’exportation des technologies américaines et les sanctions imposées à la Russie après l’invasion de l’Ukraine, la Chine est confrontée à des difficultés pour importer le progrès technologique. Une réorganisation complète de la chaîne de valeur haut de gamme et de l’industrie technologique chinoise pourrait être nécessaire. Les segments à forte intensité d’innovation, tels que l’intelligence artificielle (IA), l’informatique quantique, les semi-conducteurs, les sciences de la santé et l’industrie spatiale, devraient être privilégiés. Cela permettra bien évidemment à la Chine de rester compétitive à l’extérieur et de continuer à renforcer la demande de ses biens et services à l’étranger.
Deuxièmement, pour réaliser la partie « circulation interne » de l’équation de la « double circulation », la Chine devra promouvoir davantage la redistribution du revenu intérieur. L’absence de structures de protection sociale plus matures incite les ménages chinois à être prudents et à épargner davantage plutôt qu’à dépenser, ce qui rend encore plus difficile une augmentation matérielle de la consommation intérieure. La seule façon de briser ce cycle est de modifier la structure des incitations dans le pays.
Davantage de transferts directs et de prestations de sécurité sociale rassureraient les ménages chinois, les rendant plus disposés à dépenser une part plus importante de leurs revenus et de leur épargne. Cela favoriserait la croissance de la consommation personnelle. Pour cela, il faut modifier la composition de l’allocation des ressources du secteur public, en investissant moins dans l’immobilier ou les infrastructures physiques et en augmentant les transferts fiscaux vers les programmes de sécurité sociale.
Dans l’ensemble, la palette de nouveaux hauts responsables issus du Congrès national du PCC, sous la direction du président Xi Jinping, renforce les récents changements de politique économique, notamment l’autonomie technologique et la redistribution des revenus. Nous pensons que la Chine va réussir sa transition vers un modèle de croissance dynamique à « double circulation ». Cela devrait permettre de maintenir un taux d’expansion du PIB supérieur à 4% au cours des prochaines années.