Deux pays dont la dette ne serait pas soutenable sans des réformes en profondeur. Deux pays très endettés, surtout auprès du FMI. L’Egypte totalise une dette de 17,9 milliards de dollars (la 2ème à l’échelle mondiale et la première en Afrique). La Tunisie doit au FMI 2,04 Mds de $ (la 10ème à l’échelle mondiale et la 6ème au niveau africain). Mais en pourcentage du PIB, la situation devient plus délicate pour la Tunisie. Sa dette FMI s’élève à 4,4% du PIB, soit la 4ème place à l’échelle mondiale et la première en Afrique.
Pourquoi eux et pas nous ? Une question qui taraude beaucoup de Tunisiens, au lendemain de la finalisation de l’accord de l’Egypte avec le FMI et la déprogrammation du passage du « Dossier Tunisie » devant le board du Fonds. Plusieurs facteurs expliquent la position avantageuse de l’Egypte.
Une question d’implémentation des réformes
L’Egypte se caractérise par une visibilité politique et une détermination gouvernementale pour engager les réformes les plus douloureuses recommandées par le FMI. Le caractère militaire du régime y est pour beaucoup. En Tunisie, la machine des réformes est fortement grippée par la main tremblante, le blocage syndical et la dérive populiste. La concentration du pouvoir entre les mains du président de la République (Article 117 et nouvelle Constitution) explique l’exigence du FMI de la signature du chef de l’Etat.
Une question de crédibilité
Le Staff Level Agreement s’est évaporé par la non-publication de la loi de Finances 2023, alors qu’elle était le pilier du cadrage macro-économique débattu entre équipes techniques.
Une question de positionnement stratégique
Le soutien politique américain est sans faille à l’Egypte, compte tenu du rôle joué par l’Egypte dans la région (sécurité des frontières israéliennes). La contribution tunisienne au contrôle de l’immigration clandestine vers l’Europe ne pèse pas énormément dans la balance politique des membres du Conseil du FMI.
Bref, le courage politique n’est pas de réussir à bloquer l’accord avec le FMI, sinon, nous serons amenés à ajouter le voyage de l’équipe tunisienne à Washington au dossier du gaspillage de l’argent public. Le courage se mesure à la capacité de présenter un projet de réforme crédible, bien négocié à l’échelle domestique, convaincant pour les bailleurs de fonds et qui va au-delà du FMI pour réformer sérieusement le pays.
Cet article est disponible dans le mag de l’Economiste Maghrébin N° 859- du 21 décembre 2022 au 4 janvier 2023