En dépit de son importance, l’information est passée inaperçue. Le GAFI, une vieille connaissance de la Tunisie, a mis en garde les deux puissances économiques africaines. Et ce, en raison de lacunes dans la lutte contre le financement illicite et le crime organisé.
Le Groupe d’action financière internationale (GAFI) a déclaré, en février 2023, qu’il plaçait l’Afrique du Sud et le Nigeria sur sa liste grise des pays qui doivent faire davantage d’effort pour améliorer leur capacité à lutter contre la criminalité financière. En effet, cette décision les expose à une surveillance accrue de la part des investisseurs et des banques du monde entier.
Effectivement, les actions du GAFI peuvent fortement influencer la façon dont la probité financière des pays est perçue. Les banques et les investisseurs devraient soumettre les transactions avec ces pays à un examen plus approfondi, des coûts que les économies en souffrance de l’Afrique du Sud et du Nigeria peuvent difficilement supporter.
Toutefois, il est certain que les coûts d’une surveillance accrue seront nettement inférieurs aux coûts à long terme d’une contamination de l’économie par les flux des produits du crime et de la corruption.
Défaillances partout
L’Afrique du Sud est la deuxième économie du G20, après la Turquie, à figurer sur cette liste. Les banques locales ont déjà déclaré avoir renforcé leurs contrôles pour atténuer les effets de ce classement.
Le gouvernement du président Cyril Ramaphosa s’est empressé l’année dernière d’adopter des lois. Et ce, afin de combler les lacunes identifiées par le GAFI. Toutefois, il a eu du mal à concrétiser des progrès dans les enquêtes et les poursuites concernant la criminalité organisée.
La Banque centrale d’Afrique du Sud a annoncé l’adoption d’une approche de tolérance zéro en ce qui concerne l’utilisation abusive du système financier par les blanchisseurs d’argent.
Quant au Nigeria, un long travail l’attend. Son intégration dans cette liste grise pourrait augmenter les coûts de transaction financière et de mise en conformité pour un secteur bancaire où des pénuries sévères de devises étrangères sont déjà observées.
Par ailleurs, l’insurrection militante prolongée dans le nord du Nigeria, les tensions dans le delta du Niger, les problèmes dans les pays voisins et l’important secteur informel exacerbent les risques de transactions intérieures et transfrontalières illicites.
Le système financier nigérian est très dépendant des transactions en espèces. En effet, ces facteurs menacent le régime de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
Numériser ou passer à la liste noire
Le meilleur moyen pour accélérer les réformes reste le développement des capacités numériques des systèmes bancaires. C’est le seul moyen efficace pour faciliter l’identification et le signalement des lacunes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent. Cela nécessite beaucoup de temps. Nous voyons mal comment les deux pays pourraient quitter la liste dans un avenir proche.
Pour rappel, l’organisme créé par le G7 peut inscrire sur liste noire les systèmes bancaires qui présentent de graves lacunes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Seuls trois pays y figurent, à savoir l’Iran, la Corée du Nord et le Myanmar.