Le syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) et nombre d’organisations de la société civile ont vivement condamné l’acharnement des ministres du gouvernement Bouden contre la liberté de la presse ainsi que leur empressement à brandir la menace de lois répressives dans le but de traquer tout discours critique sur les politiques publiques de l’État.
Dans une déclaration commune publiée, lundi, les signataires ont exprimé leur soutien absolu aux deux journalistes récemment cités devant la justice (Mohamed Boughaleb et Monia Arfaoui) et à tous les journalistes et producteurs de contenu journalistique qui sont légalement poursuivis par des parties gouvernementales, sur fond de « critiques portées contre les politiques publiques et la révélation de dossiers importants d’intérêt général. »
Les signataires de la déclaration ont exhorté les militants de la société civile et politique à participer massivement à la manifestation de soutien qui aura lieu le 12 avril courant devant le siège de la caserne d’el-Gorjani en solidarité avec les journalistes Monia Arfaoui et Mohamed Boughaleb.
Ils ont également fustigé la montée en puissance des campagnes d’incitation et de diffamation ainsi que les poursuites judiciaires contre les journalistes, les militants et les dissidents d’opinion, cite encore la déclaration.
Face à cette escalade sans précédent visant les journalistes, les signataires de la déclaration ont lancé un appel à une campagne nationale visant à suspendre le décret-loi 54 de 2022 relatif à la lutte contre les crimes liés aux systèmes d’information et de communication, menaçant de « recourir aux mécanismes judiciaires nationaux et internationaux pour le contester. »
Tout en dénonçant la poursuite de l’application par la justice du décret-loi 54, les signataires de la déclaration tiennent à souligner que ce texte porte atteinte aux règles juridiques élémentaires, notamment la proportionnalité du crime avec la peine et le principe d’égalité devant la loi.
C’est aussi un texte qui instaure une immunité renforcée en faveur de l’agent public face aux « critiques constructives », poursuit la déclaration, mettant en garde contre « les risques potentiels que véhicule ce décret-loi sur l’avenir des droits et libertés numériques ».
Les signataires de la déclaration ont exhorté les autorités judiciaires à s’abstenir de faire recours à ces textes législatifs liberticides, dès lors qu’ils constituent une menace réelle pour la démocratie et les droits de l’homme.
Il convient de signaler que le journaliste, Mohamed Boughaleb, comparaît devant la justice suite à une plainte portée contre le ministère des Affaires religieuses, sur fond d’accusations d’imputation d’actes illégaux à un agent public, de diffamation et de publication de fausses informations, au sens du code pénal et de l’article 24 du décret-loi n°54 de 2022.
La journaliste Monia Arfaoui, elle aussi, comparaît devant la justice en vertu du décret-loi 54 sur fond « d’une publication critiquant la suspension d’un programme de partenariat entre le ministère des Affaires religieuses et le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme.»
Le directeur du site « Business News », Nizar Bahloul, est lui aussi poursuivi en justice sur fond d’un article critiquant la politique du gouvernement, dans lequel il a dressé un bilan de l’activité du gouvernement pendant 13 mois.
Le procès visant Nizar Bahloul a été porté par la ministre de la Justice, Laila Jaffal.
Parmi les signataires de la déclaration, des syndicats, des organisations, des associations ainsi que des observatoires, dont l’UGTT, le SNJT, l’Association tunisienne des femmes démocrates, la Ligue tunisienne de défense des droits de l’homme (LTDH), et le Forum tunisien des droits économiques et sociaux.
Avec TAP