Selon Human Rights Watch (HRW), Kaïs Saïed est en train de redoubler d’efforts pour neutraliser Ennahdha. Au moins 17 membres ou anciens membres du parti islamiste ont été arrêtés en Tunisie depuis décembre 2022, y compris le chef historique du mouvement. Dans la foulée, ses bureaux ont tout bonnement été fermés.
Dans un rapport publié jeudi 11 mai 2023, l’ONG Human Rights Watch appelle à « libérer les opposants arrêtés arbitrairement et à mettre fin aux restrictions des libertés d’association et de réunion » en Tunisie. Selon Salsabil Chellali, directrice du bureau de HRW en Tunisie, « la dernière tactique en date utilisée par les autorités tunisiennes pour réduire ses détracteurs au silence consiste à lancer des accusations de complot à tout-va contre tous ceux qui contestent le tournant toujours plus autoritaire pris par le président ». Autre reproche de l’organisation à Kaïs Saïed : ni Noureddine Bhiri, ni Rached Ghannouchi et encore moins Ali Laarayedh n’ont été inculpés à ce jour.
Pouvoirs exorbitants
Ainsi, Human Rights Watch accuse le Chef de l’Etat d’avoir instauré « un régime personnel, s’arrogeant des pouvoirs extraordinaires depuis le 25 juillet 2021 ». Et de constater que le Président de la République gouverne par décret, ce qui lui permet de détruire l’indépendance de la justice. En effet, constate HRW, il a dissous le Conseil supérieur de la magistrature dont le rôle est de garantir l’indépendance de la justice. Ainsi, dans ce contexte il a congédié 57 juges. Sachant que les autorités ont refusé d’appliquer une décision d’un tribunal administratif ordonnant la réintégration de 49 d’entre eux.
Mandat contre Ghannouchi
L’ONG rappelle qu’un mandat de dépôt a été émis par un juge d’instruction contre Rached Ghannouchi. Et ce, pour « tentative de changer la nature de l’Etat » et « complot contre la sureté de l’Etat ».
Toujours selon HRW, Ali Laarayedh, ancien ministre de l’Intérieur et Premier ministre, « est poursuivi en justice pour des décisions prises lorsqu’il était au pouvoir entre 2011 et 2014 ».
Le rapport de Human Rights Watch rappelle qu’il est détenu depuis le 19 avril, sans avoir comparu devant un juge.
Au final, l’ONG cite d’autres cas d’arrestations qu’elle juge arbitraires et des placements en détention préventive dans l’attente d’un procès. Alors qu’il s’agit d’une mesure exceptionnelle, selon l’article 84 du code de procédure pénale tunisien.