« La Tunisie est réellement parvenue à rembourser près de 74 % du service de sa dette extérieure, contrairement aux prévisions des agences de notation et des marchés financiers. Mais pour atteindre la stabilité financière, le pays doit miser sur l’autofinancement à travers l’exécution des réformes structurelles ». C’est ce qu’affirme l’expert économique et ancien ministre du Commerce, Mohsen Hassan.
Dans une interview accordée à l’Agence TAP, l’économiste indique que la réussite de la Tunisie à honorer ses engagements est due à plusieurs facteurs, dont essentiellement les transferts des Tunisiens Résidents à l’étranger (TRE). Lesquels ont atteint, à fin juin 2023, 3 915 millions de dinars (MDT).
Selon lui, les transferts des TRE sont devenus, aujourd’hui, une source importante de devises pour la Tunisie; et ce malgré la hausse des coûts des transferts d’argent.
Les services des transferts sont élevés
A cet égard, une étude publiée par la Banque mondiale (BM) a révélé que les services de transfert d’argent coûtent en moyenne 8,7 % du montant transféré. Ce qui représente un taux élevé.
Dans ce contexte, l’ancien ministre souligne que l’autorité est appelée à accorder plus d’importance à cette source. Et ce, en fixant les services de transfert d’argent et en prenant en charge une partie de ces coûts.
Pour ce faire, il fait état de l’importance de la diplomatie, notamment du côté économique, en accordant un intérêt à la diaspora, à travers l’incitation à l’épargne et à l’investissement, et la simplification des procédures d’investissement.
Des recettes touristiques conséquentes
En outre, il souligne la capacité de la Tunisie à honorer ses engagements par la hausse des recettes touristiques qui ont atteint au 1er semestre 2023 les 2 220 millions de dinars. Soit une hausse de 54,4 % par rapport à 2022.
Par ailleurs, Mohsen Hassan appelle à un réexamen du rendement du secteur touristique en vue de développer ses recettes, à travers l’encadrement, l’amélioration de la qualité du produit touristique et sa diversification, le commerce électronique; ainsi que le développement des incitations à l’investissement dans le secteur, notamment le tourisme saharien, des congrès et culturel.
Ainsi, la baisse du déficit de la balance commerciale jusqu’à juin 2023 de 26,3 %, grâce à la hausse des exportations de 10 % et la baisse des importations, a constitué un autre processus pour préserver les réserves en devises.
Il a relevé que le taux de change du dinar contre les devises étrangères, qui s’est amélioré de 0,48 % et a préservé sa stabilité, sans enregistrer des fluctuations comme c’est le cas de l’Egypte ou de la Turquie, compte un facteur déterminant dans le remboursement du service de la dette.
Pas de FMI, mais les réformes sont indispensables
Il commente : « Ceci constitue un point fort de la politique monétaire en Tunisie. Par conséquent, il est impératif de préserver le taux de change et de le protéger contre les fluctuations, à travers une coordination complète entre la Banque centrale de Tunisie et le gouvernement, c’est-à-dire entre les autorités monétaires et gouvernementales. »
Dans son analyse des facteurs de la résilience des finances publiques, il a précisé que même si la Tunisie n’est pas parvenue à un accord avec le FMI, elle a pu obtenir des crédits, de la part de l’Arabie saoudite mais aussi de crédits multilatéraux.
M. Hasan a indiqué que la Tunisie, qui a réussi à préserver sa stabilité financière, devrait introduire des réformes économiques aptes à promouvoir la croissance et les grands équilibres financiers. Tout en appelant à cet égard à revoir les politiques sectorielles, dont en particulier le secteur de l’agriculture. Et rappelant qu’il faudrait mettre en place des réformes structurelles et améliorer le climat des affaires.
Lutte contre la corruption et l’économie parallèle
De plus, l’expert économique indique que la lutte contre la corruption devrait comprendre de nouvelles mesures. Lesquelles permettraient aux banques de jouer leur rôle traditionnel dans le financement de l’investissement. Il souligne aussi l’importance de développer la bourse et les marchés financiers et l’infrastructure numérique.
« La Tunisie nécessite la mise en place d’une réforme fiscale basée sur la réduction des taxes pour encourager l’investissement et élargir la base imposable et lutter contre l’évasion fiscale et le secteur parallèle », a-t-il précisé.
Il a également rappelé l’importance des mesures effectuées par les autorités sécuritaires qui ont constitué un nouveau début dans la lutte contre l’économie parallèle.
Enfin, M. Hasan a insisté sur l’impératif de revoir les législations régissant le secteur des hydrocarbures, afin d’encourager la prospection et l’exploration. Mais aussi de mettre en place des réformes visant à réaliser une transition énergétique, étant donné que la production de la Tunisie n’a pas dépassé les 4 % dans ce domaine.
Avec TAP