Les soldats israéliens, qui tuent, par centaine et à tout bout de champ, des civils Palestiniens, ne font que nourrir le ressentiment à leur encontre. Un ressentiment qui évidemment ne faiblit pas avec le temps surgissant à tout moment. Et qui, à la différence de la haine, est « rationalisé » et « ruminé », pour ainsi dire, constamment. Et au lieu de disparaître, il augmente donc avec les années et agit comme ces couches de la terre superposées et que le temps ne fait que solidifier.
« Comme une blessure jamais cicatrisée, transmise de génération en génération et qui, par effet d’accumulation, en vient à donner sens à l’histoire de toute une classe sociale, de tout un peuple. Le ressentiment agit à la manière d’un « explosif ».
Voici ce qu’écrit Marc Ferro, dans son livre “Le Ressentiment dans l’histoire. Comprendre notre temps“ (Paris : Odile Jacob, 2007, 226 pages). Un ressentiment « qui fait les révoltes, les révolutions et les guerres », assure le philosophe français.
« Je veux tuer le plus de musulmans »
Un ressentiment qui est aussi sans doute l’un des deux faits caractéristiques de la guerre qui se déroule, depuis le 7 octobre 2023, sous nos yeux à Gaza. Avec, pour le second fait, l’entrée définitive de l’Iran dans la région. Au fait, Israël et ceux qui la soutiennent auront, avec la guerre de Gaza, atteint le contraire de l’objectif visé. Un ressentiment qui ne faiblit pas, avec le temps surgissant à tout moment. Et qui, à la différence de la haine, est « rationalisé » et « ruminé » pour ainsi dire constamment. Et au lieu de disparaître, il augmente avec les années et agit comme ces couches de la terre superposées et que le temps ne fait que solidifier.
On se souvient de cette « prophétie » de l’ancien Premier ministre israélien, David Ben Gourion, concernant les Palestiniens : « Les vieux mourront et les jeunes oublieront ». Force est de constater que cela n’a pas marché. Bien au contraire. Les faits le montrent tous les jours. N’a-t-on pas du reste remarqué que nous sommes passés en moins de cinquante ans -1978- d’une Intifidha des « enfants de la pierre » à une véritable guerre avec des hommes en armes qui continuent à tenir en haleine ce que l’on a considéré comme l’une des plus importantes armées du monde ? Preuve s’il en est que le ressentiment a fait son effet.
« Bulles médiatiques »
Et personne ne peut savoir ce à quoi cela pourrait aboutir. Certainement des évolutions en défaveur de ceux qui en sont à l’origine. Un journaliste du Nouvel Observateur avait rapporté ces propos d’un milicien serbe, au plus fort de la guerre du Kosovo en 1998-1999, opposant l’armée yougoslave à l’Armée de libération du Kosovo : « Je veux tuer le plus de musulmans pour me venger de la mort de l’un de mes aïeux par les Ottomans…au XVème siècle.
Comme le crime n’aboutit à rien. Les morts civils tombés dans les conflits ne font que renforcer le ressentiment de la population et renforcer leur adhésion pour les combattants. Les Etats-Unis d’Amérique ont bien tué près de deux millions de civils au Vietnam. Ils ont fini, après vingt ans (1955 à 1975) de guerre, de quitter le Vietnam.
Et il va sans dire que les médias n’en finissent pas d’entretenir la flamme du ressentiment. En rappelant à chaque guerre des faits anciens, les médias sont, pour ainsi dire, une arme contre l’oubli. Notamment lorsqu’il y a insistance avec ces « bulles médiatiques » et « circulation circulaire de l’information », évoquées par bien des académiciens rompus aux sciences de la communication, devenues des comportements saillants de nombre de médias. Lorsque tous les médias s’y mettent pour raconter des événements.
« La petite fille au napalm »
Observez du reste bien les photos de la guerre du Vietnam. Ne sont-elles pas restées pour toujours dans la mémoire de plus d’un à travers le monde ? L’une d’entre elles (datant de 1972) et que nous reproduisons dans cet article participe encore de ce ressentiment anti-américain (une étude récente, en décembre 2022, l’a montré), dans nombre de contrées vietnamiennes. Appelée « La terreur de la guerre » ou « La petite fille au napalm », on y voit une petite fille en pleurs, fuir en compagnie d’autres enfants, après un bombardement.
Voici ce que dit cette étude : « Cinquante ans plus tard, la photo de “La petite fille au napalm“ continue à faire le tour de la planète. La puissance du message qu’elle fait passer continue d’interpeller l’opinion publique mondiale, qui ne peut rester insensible face aux visages terrifiés de ces enfants ».