Face à la crise énergétique que la plupart des pays affrontent, marquée par une production en berne et des prix en hausse, l’efficacité énergétique apparaît comme une réponse rapide et efficace pour les années à venir. Le défi énergétique est considérable, nécessitant un bilan précis de la situation actuelle et une action concertée des industriels pour lutter contre la pollution et s’engager dans une transition énergétique plus écologique, réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Dans trois ans, les entreprises tunisiennes pourraient être soumises à une taxation carbone s’il n’y avait pas d’actions concrètes.
C’est dans ce contexte que la Chambre de commerce et d’industrie tuniso-française (CCITF) a organisé un séminaire sur « L’efficacité énergétique et l’intégration des énergies renouvelables dans l’industrie » le mercredi 13 décembre 2023 à Tunis. Cet événement a rassemblé de nombreux experts et industriels pour discuter sérieusement de ces questions cruciales.
En marge de cet événement, Khelil Chaibi, président de la CCITF, souligne les défis imminents à leconomistemaghrebin.com pour les entreprises exportatrices en Tunisie, tels que la taxation du carbone. Il insiste sur la nécessité pour les entreprises de s’aligner sur les normes européennes, que ce soit dans le domaine des affaires ou le secteur du transport incluant l’adoption rapide de solutions telles que les bus électriques. De plus, il met en lumière l’urgence de résoudre des problèmes comme le traitement des déchets pour garantir la conformité internationale, exprimant toutefois son optimisme quant à la prise de conscience générale et à la volonté de résoudre ces problèmes rapidement.
Il convient de noter que le secteur industriel est le troisième secteur consommateur d’énergie en Tunisie avec plus de 25% de consommation d’énergie finale. Pour cette raison, l’efficacité énergétique constitue un moyen pour les entreprises de gagner en compétitivité. Et ce, à travers la réduction de leur facture énergétique et, partant, de leurs coûts de production.
Ensuite, parce que la Tunisie dépend actuellement pour 60% des importations énergétiques et ce chiffre est orienté à la hausse. Une amélioration de l’efficacité énergétique pourrait alléger la dépendance énergétique du pays vis-à-vis des importations, tout en réduisant les émissions nuisibles au climat.
Enfin, cela conduirait à faciliter la transition énergétique annoncée en 2014 visant une réduction de 34% des besoins en énergie à l’horizon 2030. Ainsi que la mise en place de mécanismes favorisant les investissements rentables et respectueux du climat.
Les entreprises tunisiennes face aux défis énergétiques
Lotfi Brahim, enseignant et ingénieur-chercheur en génie des procédés, a souligné le déficit énergétique en Tunisie, qui atteint 9,6 milliards de dinars en 2022. Il estime que l’efficacité énergétique offre un vaste champ d’innovations technologiques et financières. Selon lui, le secteur privé peut jouer un rôle clé en finançant la plupart des investissements nécessaires aux équipements et aux infrastructures.
Cependant, malgré des efforts remarquables, la Tunisie n’a atteint qu’un taux de transition énergétique de 2%. Lotfi Brahim insiste sur la nécessité de renforcer les politiques en cours, de consolider les capacités des acteurs privés, scientifiques, publics et institutionnels, de mettre en place des instruments financiers appropriés et de développer des synergies transversales pour atteindre les objectifs.
Rappelons que le déficit de la balance commerciale énergétique s’est creusé davantage en 2022, passant d’environ 5,6 milliards de dinars en 2021 à plus de 9,6 milliards en 2022, soit une augmentation de 72%. Aujourd’hui, il y a la possibilité de réduire ce déficit à 22%, soit 4 milliards de dinars si on passe vers la transition énergétique pour les entreprises. A titre d’exemple, selon Lotfi Brahim, les industriels peuvent réduire le coût de consommation d’électricité en minimisant le coût annuel de consommation en passant de 830 à 217 mille dinars, soit une réduction de 25%.
Au niveau législatif, la Tunisie a mis en place plusieurs lois et décrets visant à promouvoir les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Des crédits spécifiques sont également prévus pour des projets d’autoproduction et d’autres investissements liés à la maîtrise de l’énergie.
A cet effet, il rappelle l’arrêté de la ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Energie du 17 novembre 2022, portant fixation de la puissance minimale des projets d’autoproduction d’électricité à partir des énergies renouvelables raccordées sur le réseau haute et moyenne tension soumis à l’accord du ministre chargé de l’énergie.
En conclusion, les enjeux sont considérables, et l’efficacité énergétique représente une opportunité majeure d’innovation technologique et financière, surtout pour le secteur privé.
Les efforts publics doivent se poursuivre pour renforcer les politiques en cours, consolider les capacités des acteurs et mettre en place les mécanismes financiers nécessaires. La coopération régionale et internationale ainsi que l’intégration cohérente des initiatives d’efficacité énergétique dans les stratégies de développement sont essentielles pour relever ces défis complexes.