Nul ne peut douter que le contexte macroéconomique dans lequel évoluent nos entreprises est plutôt morose. La croissance économique est restée molle depuis quelques années. Nous avons fait 4.5% de croissance en 2021, et l’année 2020, l’année du Co-vid, a enregistré une croissance négative de 9%. En 2022, notre croissance a été très modeste, soit 2.4%, et on serait pour l’année écoulée 2023 vraisemblablement autour de 1%. Clairement, nos voisins et la quasi-totalité des pays du Moyen-Orient et de l’Afrique ont fait mieux que nous.
Nous payons sans doute le prix de l’effet de la faible pluviométrie qui perdure depuis plus de 5 ans, avec des niveaux de précipitations largement inférieurs à la moyenne enregistrée au cours des dernières décennies avec, en prime, une situation de quasi-sécheresse sur les deux dernières années. Mais cela n’explique pas tout. En réalité, sur les trois moteurs usuels de la croissance économique, deux sont en berne, voire en panne, à savoir l’investissement et la consommation. Le troisième, qui est l’export, fonctionne fort heureusement mais pas assez par rapport au potentiel.
L’inflation a été plutôt contenue en 2023, mais elle reste tout de même à un niveau élevé (9%) et elle est de 13% pour les seuls produits alimentaires. Deux bonnes nouvelles néanmoins à la clôture de l’année 2023 : la réduction du déficit de la balance commerciale et donc du déficit de la balance des paiements. La balance des paiements a aussi mieux tenu sous le double effet et du rebond des recettes touristiques et du maintien à un rythme élevé, depuis quelques années déjà, des transferts des Tunisiens résidents à l’étranger.
En réalité, sur les trois moteurs usuels de la croissance économique, deux sont en berne
Ceci a permis la stabilisation du taux de change du dinar par rapport aux principales devises que sont l’euro et le dollar. C’est ce contexte macroéconomique peu encourageant, auquel s’ajoute le milieu institutionnel de l’investissement et de conduite des affaires, non encore stabilisé et de moins en moins attractif, qui impactent nos entreprises. Elles en subissent tous les effets de façon directe et indirecte. Elles deviennent, dans l’ensemble, plus fragiles et leur capacité de résilience est, au fil des années, entamée. Nous assistons à de plus en plus de casses dans le tissu des entreprises.
Tout de même, il y a, fort heureusement, dans ce tissu, des entreprises qui continuent à réussir malgré le contexte défavorable. Elles font de la croissance, de la forte croissance même, elles continuent à créer de la valeur, à offrir des opportunités pour nos jeunes et à porter haut et avec succès la marque « made in Tunisia », bien au-delà de nos frontières.
Tout de même, il y a, fort heureusement, dans ce tissu, des entreprises qui continuent à réussir malgré le contexte défavorable.
Elles sont pour la plupart des PME, voire de toutes jeunes entreprises opérant dans différents secteurs d’activité.
Nous assistons également depuis plusieurs années à la naissance de vagues successives de jeunes et de très jeunes, tout juste diplômés et parfois même encore sur les bancs de leurs écoles, talentueux, créatifs, avec un esprit entrepreneurial bien ancré. Ils ont réussi à faire de notre pays un grand espace de créativité et un écosystème d‘entrepreneuriat et d’innovation, occupant une place privilégiée sur l’échiquier régional et bien visible au niveau mondial. Nous avons à la clé de belles success stories parties d’ici et qui rayonnent maintenant à l’échelle internationale.
C’est donc dans ce contexte assez contrasté que nos entreprises évoluent. Les agrégats macroéconomiques sont plutôt moroses, mais elles peuvent se remettre rapidement sur la bonne orbite. Nous sommes en présence d’un tissu d’entreprises essoufflé é, mais dont une part réussit et peut tirer l’ensemble vers le haut. Notre écosystème est innovant et performant, il est capable d’accompagner la compétitivité de nos entreprises. Alors, voyons les choses du bon côté pour nous projeter vers un avenir meilleur.
Par Noureddine Hajji
Cet éditorial a été publié dans le numéro spécial de classement de l’Économiste Maghrébin de janvier 2024