Ce zoom vise à mettre en lumière les risques inhérents au financement du déficit public, particulièrement lorsqu’il recourt à des mécanismes tels que l’avance directe de la Banque centrale.
Il est crucial de comprendre ces risques pour élaborer des politiques économiques prudentes et soutenables. En premier lieu, un des principaux risques associés au financement du déficit public consiste dans le potentiel impact sur l’inflation. Lorsque la Banque centrale crée de la monnaie pour acquérir des titres de dette, cela entraîne une augmentation de la masse monétaire en circulation, alimentant ainsi une pression inflationniste, via une augmentation de la demande globale dans un contexte de tensions sur les capacités productives. De fait, si l’économie est déprimée, l’injection monétaire booste la demande et relance l’activité et l’emploi, en dehors de déséquilibres de marché structurels latents. Ces derniers, seront diagnostiqués et traités en dehors de l’espace de la politique monétaire.
En tout état de cause, une inflation accrue- dans un contexte de tensions sur les capacités productives- peut avoir des conséquences néfastes sur le pouvoir d’achat des ménages, sur le potentiel export, sur la stabilité économique et la confiance des investisseurs.
En deuxième lieu, le financement du déficit public peut exercer des pressions à la hausse sur les taux d’intérêt. L’émission de titres supplémentaires de dette peut accroître l’offre de titres sur le marché, faisant grimper le rendement et le taux d’intérêt. Or, des taux d’intérêt plus élevés accroissent les charges d’intérêt pour le gouvernement, augmentant ainsi la dette publique et pesant sur le budget, d’une part; et d’autre part, exercent un effet d’effet d’éviction de l’investissement productif privé et de la consommation de biens de consommation durable des ménages. Ce double impact pervers tire l’économie vers la récession, voire vers la stagflation (inflation croissante et chômage croissant).
En troisième lieu, le recours fréquent au financement du déficit public peut entraîner une augmentation significative de la dette publique. Des niveaux élevés de dette peuvent compromettre la soutenabilité fiscale, entraînant des difficultés à rembourser les emprunts, à attirer les investisseurs et à maintenir la confiance des marchés financiers.
En quatrième lieu, la dépendance continue à des mécanismes tels que l’avance directe de la Banque centrale peut générer une relation de « dépendance monétaire » entre les pouvoirs publics et la Banque centrale. Cela peut compromettre l’indépendance de cette dernière et engendrer des politiques monétaires et de change moins efficaces, influencées par les impératifs budgétaires.
En cinquième lieu les investisseurs, tant nationaux qu’étrangers, surveillent de près la gestion des finances publiques. Un financement excessif du déficit public peut éroder la confiance des investisseurs dans la stabilité économique du pays. Il s’ensuit une fuite des capitaux, des réductions des notations de crédit et des difficultés à lever des fonds sur les marchés internationaux.
Enfin, des politiques de financement du déficit public mal gérées, peuvent avoir des répercussions sur la croissance économique, dans la mesure où l’allocation des ressources est inefficace, les coûts d’emprunt élevés et l’incertitude économique résultantes freinent les investissements, la production et l’emploi.
Pour autant, bien que le financement du déficit public soit parfois nécessaire, il est impératif de gérer ces risques avec prudence.
Des politiques économiques structurelles équilibrées, la transparence budgétaire et une surveillance constante sont essentielles pour atténuer les conséquences négatives potentielles d’un financement direct et/ou indirect du déficit public sur l’économie.
* Dr. Tahar EL ALMI,
Prof Associé à l’IHET,
Institut des Hautes Etudes-Tunis,
Psd-Fondateur de l’Institut Africain
D’Economie Financière (IAEF-ONG)