Le président américain Joe Biden, viscéralement attaché à l’Etat hébreu, est-il désormais disposé à lâcher le sanguinaire Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou? Oui, car il s’agit de son avenir politique : les sondages démontrent que les jeunes électeurs, les personnes de couleur, les musulmans et les Arabes américains désapprouvent fortement sa gestion de la guerre de Gaza.
Il n’est jamais trop tard pour devenir raisonnable et sage, disait le philosophe allemand Emmanuel Kant. Joe Biden, le fervent soutien de l’Etat hébreu et l’ami de 40 ans de Benyamin Netanyahou, a-t-il fini enfin par comprendre que rien ne pouvait arrêter le sanguinaire Premier ministre israélien dans sa folie meurtrière et qu’il pourrait perdre la présidentielle de 2024 en partie à cause de lui?
« Ce type est un salaud »
Ainsi, citant des sources « bien informées », la chaîne américaine NBC a rapporté, lundi 12 février, que le très policé locataire de la Maison Blanche, visiblement en colère, a déploré- lors de plusieurs conversations privées, notamment avec des donateurs de sa campagne électorale- son incapacité à convaincre le gouvernement israélien de changer sa tactique militaire à Gaza.
« Ce type est un salaud », se serait-il écrié à propos du chef du gouvernement israélien qu’il accuse d’être « le principal obstacle » au cessez-le-feu, dans « l’unique but de se maintenir au pouvoir ».
Toujours selon les mêmes sources, Biden qui « aurait haussé le ton contre Netanyahu à au moins trois reprises », a déclaré avoir investi beaucoup d’efforts pour tenter d’amener Tel-Aviv à signer un accord de cessez-le-feu à Gaza; mais que Netanyahou « lui fait vivre l’enfer », en allusion à la poursuite des massacres de civils dans la bande de Gaza. Et ce, malgré les demandes répétées à l’adresse d’Israël de réduire le nombre de victimes civiles. Ajoutant qu’il est « impossible de traiter avec lui ». Contredisant ainsi en privé le Conseil national de sécurité américain qui a publiquement soutenu que les deux hommes entretenaient des « relations respectueuses ».
« L’une des questions qui dérange Biden, assure le NBC, est le rejet par Netanyahou des accords sur lesquels travaille l’administration américaine. Le plus récent étant celui négocié avec l’Arabie saoudite en faveur d’un cessez-le-feu comme condition sine qua non pour avancer dans la normalisation des relations entre Riyad et Tel-Aviv.
La rupture consommée?
En effet, la chaîne américaine NBC n’a fait que corroborer le « scoop » véhiculé par le Washington Post, le grand quotidien de la capitale américaine et l’un des titres les plus influents de la presse mondiale. Celui-ci rapportait dans son édition du dimanche 11 février que Biden est « proche du point de rupture dans sa relation avec le Premier ministre Netanyahou » et que certains de ses collaborateurs l’encouragent « à critiquer publiquement le Premier ministre pour l’opération militaire à Gaza ». De même qu’ils lui conseillent de « prendre ses distances avec un dirigeant impopulaire même dans son propre pays ».
Scepticisme
Pour quel motif? Ces collaborateurs, dont certains ont l’oreille du chef de l’Exécutif américain, critiquent le projet d’Israël de lancer une campagne militaire à Rafah, la ville la plus méridionale de Gaza, frontalière avec l’Égypte et dont la population a quadruplé sans pour autant « recevoir suffisamment de nourriture et d’eau ».
Pour eux, il serait nécessaire de fixer « les conditions du soutien à Israël », soit une opération militaire à Rafah qui « ne devrait pas avoir lieu sans un plan crédible et réalisable pour assurer la sécurité et le soutien des plus d’un million de personnes qui y trouvent refuge ». Et ce, « en raison du scepticisme généralisé quant à sa capacité à atteindre l’objectif déclaré d’une victoire militaire totale sur le Hamas ».
Realpolitik
Au final, Biden, « dont l’attachement viscéral à Israël n’est pas à prouver », est réticent à critiquer un Premier ministre en exercice, « surtout en temps de guerre ». Mais, va-t-il s’obstiner à couvrir son ami de 40 ans, quitte à ne pas prendre en compte les sondages qui s’accordent à démontrer que les jeunes électeurs, les personnes de couleur, les musulmans et les Arabes américains désapprouvent fortement sa gestion du dossier? Sans parler des dirigeants des communautés musulmanes dans les États américains clés, comme le Michigan, le Minnesota, l’Arizona, le Wisconsin, la Floride, la Géorgie, le Nevada et la Pennsylvanie, qui ont lancé une campagne pour ne pas voter en faveur de Biden lors de la présidentielle de 2024?
D’autant plus que le président candidat à sa propre succession se lance dans une campagne électorale âprement disputée et que la partie est loin d’être gagnée face à son concurrent républicain, Donald Trump, avide de prendre sa revanche.