Les protestations sociales maintiennent leur rythme de recrudescence, se tournant notablement vers des revendications d’ordre économique. Au mois de février, 160 mouvements ont ainsi été enregistrés. C’est ce qu’affirme le dernier rapport de l’Observatoire social tunisien (OST) relevant du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES)
La gouvernorat du Kef continue de dominer le classement des régions les plus fréquemment touchées par les protestations. Il occupe la première place avec un total de 38 mouvements, suivi de Tunis la capitale avec 37 mouvements, puis de Sfax, Nabeul et Jendouba. Les autres manifestations se sont réparties de manière inégale entre les différentes régions.
Ce mois-ci, le rapport a noté une préservation des acteurs traditionnels, avec les travailleurs en tête des protestataires pour le deuxième mois consécutif, portant plusieurs revendications économiques et se déployant dans divers secteurs, tant public que privé. Ce maintien des protestations ouvrières en Tunisie reflète une crise de la politique traditionnelle dans la réponse aux revendications économiques, mettant en lumière des méthodes peu efficaces pour garantir les droits des travailleurs; ainsi qu’un changement dans la nature des revendications, souvent locales et directes, concernant les salaires impayés, les augmentations, les primes et l’application des accords.
La Compagnie des Phosphates de Gafsa a été le lieu le plus fréquent des manifestations en raison de la persistance des sit-in menés par ses travailleurs. Les manifestations de rue étaient également présentes dans les premières positions, tandis que les médias ont reculé à la quatrième place après avoir été le principal canal de transmission des plaintes des acteurs ces derniers mois.
Les manifestations collectives ont dominé les mouvements observés, avec seulement deux manifestations individuelles organisées, et une présence des deux genres dans la majorité des protestations à hauteur de 85 %. Environ 20 % des mouvements étaient spontanés, alors que le reste était prévu à l’avance.
Les protestataires ont utilisé une gamme étendue de méthodes de manifestation, la plupart optant pour des rassemblements pacifiques avec 68 protestations sur 160, suivis des sit-in utilisés dans 39 manifestations. Les grèves figuraient également parmi les premières méthodes utilisées, reflétant une tendance à l’escalade dans la demande de droits. Les raisons des protestations étaient diverses, allant du soutien et de la garantie des droits des travailleurs à la résolution des problèmes environnementaux tels que la pénurie d’eau potable. Une crise persistante en Tunisie, malgré la reconnaissance constitutionnelle de son droit pour tous.
Zoom sur les méthodes et les formes de protestations
Toujours selon le même rapport, les méthodes de protestation ont également inclus des cas d’automutilation. En enregistrant une augmentation notable par rapport aux mois précédents; et ce, avec 19 cas de suicide ou de tentative de suicide, principalement chez les jeunes, survenus souvent à domicile et ayant entraîné la mort. Cela reflète un sentiment généralisé de désespoir, l’acte de suicide devenant souvent le dernier recours pour ceux, principalement des hommes, qui se sentent acculés.
Les indicateurs de violence ont également connu une augmentation, avec une augmentation des cas d’agression criminelle, la plupart entraînant la mort. Les femmes représentaient la majorité des victimes, avec un total de 55 %. La gouvernorat de l’Ariana était en tête pour le niveau de violence, et le meurtre, les agressions et les vols à l’arraché figuraient parmi les types de violence les plus fréquents le mois dernier.