Elle est une icône des musiques du monde. Elle s’appelle Souad Massi. Jeune chanteuse algérienne, elle a non seulement captivé les foules avec son timbre de voix propre à elle, mais elle est aussi une figure emblématique des mouvements contestataires. Elle est montée sur scène le 30 mars dernier pour une soirée caritative mémorable au profit de l’orphelinat Diar Essebil, dans le cadre des Jours Heureux ليام الزينة, organisés conjointement par le Mövenpick Hotel du Lac Tunis et l’Institut Français de Tunisie.
Interview
Quel est l’ingrédient secret pour avoir réussi à captiver le public?
Souad Massi : Je ne saurais précisément définir cet ingrédient, mais je ressens une proximité naturelle avec les personnes venues m’écouter. J’écris simplement à partir de ce qui m’inspire, de ce que j’ai vécu, de ce qui me touche. Raconter des histoires vraies, authentiques, cela parle aux gens, les connecte, les empêche de se sentir seuls. Je pense que c’est là le secret.
Souvent décrite comme la Tracy Chapman du Maghreb avec votre style musical, vous apportez une touche de fraîcheur sur scène. Quelles sont vos inspirations?
Effectivement, j’ai une large palette musicale. Dans ma jeunesse, j’écoutais beaucoup de folk, de country, car j’appréciais la guitare, mais aussi du flamenco. J’ai eu la chance de grandir au sein d’une famille où la musique était omniprésente. Mon oncle était guitariste de jazz, la plupart de mes cousins jouaient des instruments traditionnels et mes deux frères sont également musiciens. Cette immersion musicale m’a ouvert à la curiosité, m’a poussée à explorer différents styles musicaux, évitant ainsi de me confiner dans une seule esthétique. Je considère cette ouverture comme primordiale, car parfois, se limiter à un seul genre musical nous prive de nombreuses richesses.
La plupart de vos albums reflètent un engagement envers des questions de dignité, d’indépendance, de défense des droits des femmes. Justement, quel est le message adressé aux femmes en tant qu’artiste, citoyenne, en tant que femme et humaniste?
Je pense qu’être humaniste c’est important parce que si on perd notre humanité, on est mort, sans elle, nous perdons notre essence même. L’égoïsme et la solitude me terrifient. En tant que femme, mon conseil aux jeunes filles serait de se respecter avant tout, de travailler dur pour gagner leur indépendance et de ne pas dépendre d’autrui.
L’éducation est une arme précieuse qui garantit la liberté. Dans ma propre famille, j’ai vu des femmes dépendre toujours des hommes, et pourtant, elles m’ont encouragée à poursuivre mes études, à vivre librement et à me respecter. C’est un héritage que j’ai transmis à mes filles, car je suis convaincue que lorsque nous transmettons amour et respect à nos enfants, cela leur permet d’avoir un équilibre dans leur vie à l’âge adulte, leur permettant d’avancer sereinement.
Quels sont vos projets en cours? Et en tant qu’artiste cela vous intéresse-t-il de collaborer avec des artistes tunisiens? Si oui, avez-vous un nom en tête?
Mis à part Lotfi Bouchnak, je ne suis pas très familière avec les autres artistes tunisiens. Je sais que la scène tunisienne regorge de jeunes talents dans le rap, mais pour ce qui est du rock, je suis moins informée. Cependant, j’aimerais vraiment collaborer avec des artistes qui partagent ma vision artistique, ou même explorer de nouvelles voies.
Je suis très curieuse de faire de nouvelles rencontres artistiques, mais cela nécessiterait que je passe davantage de temps en Tunisie afin de pouvoir rencontrer ces artistes.
Et quels sont vos projets futurs Souad Massi?
Je suis actuellement en tournée un peu partout, et j’ai déjà commencé à écrire de nouveaux textes. L’écriture me prend beaucoup de temps, mais je prépare activement mon prochain album. Plutôt que de parler d’album, cela me met moins de pression de considérer ce travail comme une exploration de textes que je mettrai en musique. Cela me permet de me sentir plus à l’aise psychologiquement. Ensuite, viendra la tournée pour partager cette nouvelle musique avec mon public.