Mediterravenir organise un colloque international les 3 et 4 mai 2024, au siège de l’Utica à Tunis, sur le thème du “Transfrontalier, Développement et Entrepreneuriat”. Ce colloque vise à clarifier le concept du transfrontalier, à dresser un état des lieux, à présenter des exemples de gestion réussie du transfrontalier, et enfin à débattre de l’avenir du transfrontalier entre l’Algérie, la Tunisie et la Libye dans une première étape.
Lors de l’événement des 3 et 4 mai 2024, le sujet principal est le développement transfrontalier et l’entrepreneuriat sud-sud et nord, notamment en ce qui concerne le Maghreb.
Présente lors de ce colloque, Riadh Chaabouni Zghal, Professeure universitaire en sciences de gestion Riadh Zghal insiste sur la nécessité d’adopter une approche incrémentale pour le développement du Grand Maghreb. Elle souligne que les décisions prises lors des sommets tripartites, comme celui entre la Tunisie, l’Algérie et l’Aïbie, ont été compliquées par des divergences politiques entre les chefs d’État de l’époque, ce qui a entravé leur efficacité.
Elle propose donc de se concentrer sur des initiatives spécifiques, notamment en mettant l’accent sur les zones frontalières, qui sont souvent les régions les plus pauvres et les plus touchées par la perte de capital humain. Elle souligne que ces régions possèdent un potentiel humain et un savoir-faire considérables qu’il convient de valoriser et de soutenir.
Riadh Zghal: » Commencer par des actions réussies dans ces zones frontalières »
Elle insiste sur la nécessité de commencer par des actions réussies dans ces zones frontalières, qui pourraient servir de modèles pour d’autres régions. Elle souligne que cette approche pourrait déclencher un effet domino, où chaque succès entraîne d’autres initiatives similaires.
Mme Zghal critique également le manque de pragmatisme des politiciens et des experts, soulignant l’importance de passer de la théorie à l’action. Elle insiste sur la nécessité de développer des concepts adaptés à la réalité et de définir des méthodes pratiques pour les mettre en œuvre. Selon elle, la théorie est importante pour éclairer la vision, mais elle doit être suivie d’une réflexion sur la meilleure façon de passer à l’action.
Mais la grande question au-delà de développer des concepts adaptés à la réalité suivie d’une réflexion sur la meilleure façon de passer à l’action, on se demande quel est le coût du Non Maghreb? A cette interrogation, Nejib Tlijani, expert senior en planification stratégique (également formateur en planification) explique que le coût de ne pas avoir une coopération maghrébine significative se traduit par le maintien des pays dans un état sous-développé, les empêchant d’imposer leurs points de vue, surtout vis-à-vis du Nord qui impose ses conditions.
Il souligne qu’à moins de former un bloc maghrébin fort et unifié, permettant la création d’un grand marché capable de faire face aux pressions du Nord, les pays maghrébins resteront marginalisés et ne se développeront pas.
Néjib Tlijani: « Les responsables algériens et marocains doivent s’asseoir à la table des négociations et trouver une solution à ce conflit »
Concernant le sommet tripartite entre la Tunisie, l’Algérie et la Libye, avec l’exclusion du Maroc et de la Mauritanie, Tlijani affirme que le conflit entre l’Algérie et le Maroc persiste tant que la question du Sahara occidental n’est pas résolue. Il suggère que pour faire du Maghreb un bloc régional puissant, les responsables algériens et marocains doivent s’asseoir à la table des négociations et trouver une solution à ce conflit.
Cependant, il estime que dans les conditions actuelles, il est difficile d’être optimiste quant à la résolution rapide de ce conflit. En ce qui concerne la réunion tripartite, Tlijani la considère principalement comme une réunion sur la sécurité, en particulier en ce qui concerne la gestion du flux migratoire venant du Sud.
L’Algérie et la Libye de protéger leurs frontières avec les pays subsahariens pour éviter que la Tunisie ne subisse seules les conséquences de ce flux migratoire
Enfin il conclut l’importance pour l’Algérie et la Libye de protéger leurs frontières avec les pays subsahariens pour éviter que la Tunisie ne subisse seules les conséquences de ce flux migratoire.
Selon lui, tant que ces problèmes de sécurité et de conflit politique ne seront pas résolus, le processus d’intégration maghrébine prendra plus de temps que prévu.
En résumé, tout cela nous amène à dire qu’une approche pragmatique et incrémentale pour le développement du Grand Maghreb est évidente. Et ce dans le but de faire face aux divergences politiques. Cela sous entend entre autres l’importance de création d’un bloc régional puissant. Toutefois au delà de la théorie, il est clair que tant que les conflits persistent encore, la voie vers une intégration maghrébine significative restera long et difficile. Mais comme on dit, l’impossible n’est pas possible.