La BERD a publié ce matin du 15 mai 2024 ses prévisions économiques pour 2024-2025. La croissance dans les régions de la BERD a ralenti, passant de 3,3% en 2022 à 2,5% en 2023, ce qui est inférieur à la moyenne mondiale de 2,7%. Les prix de l’énergie en Europe sont restés relativement élevés et la reprise post-Covid dans le secteur des services s’est essoufflée.
Pour 2024, la croissance devrait remonter à 3%. Une révision à la baisse de 20 points de base par rapport aux prévisions de septembre 2023. Cela reflète, en partie, une croissance plus lente que prévu au début de 2024 en Europe centrale et dans les pays de l’Europe de l’Est. Il y a une modeste croissance en Allemagne, alors que l’activité économique dans le sud et l’est de la Méditerranée devrait être plus faible que prévu en raison des retombées de la guerre à Gaza, des défis structurels et de la lenteur des réformes en Égypte.
Un contexte global morose
Avec la modération des hausses des prix de l’énergie et, dans une moindre mesure, des denrées alimentaires, l’inflation dans les régions de la BERD a diminué, s’établissant en moyenne à 6,3% en mars 2024, contre un pic de 17,5% en octobre 2022.
Si la désinflation a été jusqu’à présent un peu plus rapide que prévu il y a un an, l’inflation reste supérieure de deux points de pourcentage au niveau d’avant la pandémie. Cette tendance est largement similaire à celle observée dans les économies avancées, où l’inflation a considérablement baissé au cours de l’année écoulée mais est restée supérieure aux objectifs des banques centrales. Ces dernières ont opté pour un resserrement monétaire. Aux États-Unis et en Allemagne, les taux d’intérêt ont augmenté en moyenne de 2,6% au cours de cette période. Toutefois, cette moyenne masque une variété d’expériences au sein des régions de la BERD. Dans une économie typique d’un pays de la BERD n’appartenant pas à l’UE, l’écart par rapport à l’Allemagne s’est progressivement réduit depuis le pic d’août 2022, alors que dans les pays de l’UE, l’écart par rapport à l’Allemagne a diminué.
Les tensions géopolitiques ont eu un impact profond sur les régions de la BERD et au-delà, entraînant une fragmentation rapide du commerce et de l’investissement, ainsi qu’un ralentissement de la croissance économique. Au cours des derniers mois, les exportations sont devenues de plus en plus concentrées lorsqu’elles sont mesurées par paires produit-pays, plus que par pays. En d’autres termes, des biens spécifiques (par exemple, des matières premières essentielles ou des biens de défense) sont de plus en plus échangés avec un nombre restreint de nations.
Avec l’escalade des tensions commerciales, les investissements directs étrangers (IDE) ont de plus en plus ciblé les économies relais, qui entretiennent des liens commerciaux étroits avec d’autres blocs. L’IDE de la Chine vers les régions de la BERD a fortement augmenté en 2023, idem pour les investissements russes dans l’Asie centrale, sous l’impulsion des services logistiques.
Du bon et du moins bon pour la Tunisie
En ce qui concerne la croissance dans le sud et l’est de la Méditerranée, elle devrait s’accélérer, passant de 2,7% en 2023 à 3,4% en 2024 et à 3,9% en 2025. Il s’agit d’une révision à la baisse des prévisions les plus récentes pour 2024, en raison de la mise en œuvre plus lente que prévu de grands projets d’investissement public en Égypte et des retombées de la guerre à Gaza. Si l’impact de la guerre sur les rendements publics en Égypte et en Jordanie a été de courte durée, l’effet négatif sur les arrivées de touristes en Jordanie et au Liban pourrait s’avérer plus durable.
En ce qui concerne la Tunisie, la BERD a révisé à la baisse ses estimations de croissance de 60 points de base. Le PIB augmentera de 1,9% et 2,0% respectivement en 2024 et 2025. L’exercice 2023 était modeste, marqué par la baisse des ventes de phosphates qui n’a été que partiellement compensée par l’expansion du tourisme, des services financiers et de l’industrie. Dans ce contexte, le chômage a augmenté pour atteindre 16,4% au cours de la dernière année, et l’inflation s’est établie à 7,5% en février 2024. Les finances publiques restent limitées, le pays a été déclassé par plusieurs agences de notation.
Néanmoins, la Tunisie a remboursé à temps l’ensemble de sa dette extérieure et continue de progresser, bien que lentement, sur des réformes clés, notamment l’assainissement progressif de la masse salariale du secteur public et la réforme de certaines subventions. Grâce aux efforts de réforme et à la poursuite de l’assainissement budgétaire, la croissance devrait remonter à environ 1,9% en 2024 et 2% en 2025. Les risques importants de détérioration sont liés à la marge de manœuvre budgétaire limitée, au fardeau élevé de la dette extérieure et à la vulnérabilité de l’économie aux chocs extérieurs. Le travail accompli par la Tunisie est donc apprécié, mais il a besoin d’être accéléré.