« Israël et le Hezbollah libanais, allié du Hamas, sont au bord de l’escalade militaire la plus dangereuse depuis le début des affrontements le 7 octobre ». C’est ce que titrait hier jeudi, le quotidien arabophone libanais An-Nahar.
Le nord d’Israël brûle. Avec le début de l’été, la moindre roquette tirée par le Hezbollah libanais sur le territoire de l’État hébreu déclenche d’importants feux de forêt.
En effet, des tirs de roquettes et de drones depuis le Liban ont déclenché au début de la semaine plusieurs incendies dans le nord d’Israël. Des dizaines d’équipes de pompiers épaulées par des équipes du Service des parcs et de la nature, de l’armée, de la police ont été mobilisées pour maîtriser les plus gros incendies qui se sont propagés près de la frontière avec le Liban.
Ainsi, un photographe de l’AFP à Kiryat Shmona, une ville du nord-est d’Israël jouxtant la frontière avec le Liban, était le témoin oculaire d’intenses brasiers ayant dévoré des pans de cette ville en grande partie évacuée à cause des échanges de tirs quasi quotidiens entre l’armée israélienne et le Hezbollah depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza.
De fait, les Israéliens ne peuvent plus vivre dans le nord de leur pays. Environ 60 000 habitants des villes et villages situés le long de la frontière nord d’Israël ont été déplacés depuis le mois d’octobre en raison des attaques transfrontalières quasi-quotidiennes à la roquette et au missile antichar menées par le Hezbollah.
« Crimes de guerre »
Même constat au sud du Liban où des incendies gigantesques se sont déclarés dans la zone boisée de Qaba à Markaba. Et ce, suite aux tirs d’obus au phosphore blanc lancés par l’armée israélienne. Une substance qui s’enflamme au contact de l’oxygène et peut être utilisée pour créer des écrans de fumée et éclairer les champs de bataille. Mais elle peut également être utilisée comme arme incendiaire et provoquer des incendies, de graves brûlures, des lésions respiratoires, des défaillances d’organes et même la mort.
« L’utilisation généralisée du phosphore blanc par Israël dans le sud du Liban met les civils en danger et contribue au déplacement de civils », a déclaré Human Rights Watch (HRW) dans un rapport publié mercredi.
Pour sa part, Brian Castner, expert des questions militaires chez Amnesty international a affirmé que l’utilisation du phosphore blanc dans des zones peuplées de civils « peut constituer une violation du droit international humanitaire ». Ajoutant d’ailleurs que « si des civils sont blessés ou tués, cela peut constituer un crime de guerre ».
Bruits de bottes
Alors que le gouvernement israélien est critiqué pour son incapacité à apporter la sécurité dans la région après les affrontements quasi quotidiens à la frontière nord depuis le 8 octobre qui ont causé la mort de dix civils du côté israélien, ainsi que celle de quatorze soldats et réservistes, Tsahal lancera-t-il dans les prochains jours ou semaines une offensive terrestre d’envergure contre le Hezbollah?
Le Premier ministre qui s’est rendu dans la région quelques heures après que les pompiers ont confirmé avoir pu maîtriser une série d’incendies majeurs dans le nord d’Israël, a prévenu mercredi 5 juin qu’Israël était prêt à répondre de manière « extrêmement puissante aux attaques du groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah au Liban » et que son armée était prête « pour une opération très intense à sa frontière nord ».
« Quiconque pense qu’il peut nous faire du mal et que nous resterons les bras croisés se trompe lourdement. » C’est encore ce qu’a déclaré Netanyahu lors d’une visite dans la ville de Kiryat Shmona, dans le nord du pays, qui a été en grande partie évacuée depuis que le Hezbollah a commencé à attaquer les communautés israéliennes et les postes militaires le long de la frontière, presque quotidiennement, depuis le 8 octobre.
Dans la journée, le gouvernement israélien a annoncé avoir augmenté le nombre de réservistes que l’armée peut mobiliser en cas de besoin, le faisant passer de 300 000 à 350 000. Il s’agit de l’appel de réservistes le plus important de l’histoire de l’Etat hébreu.
Diversion
En effet, alors qu’il subit d’énormes pressions internationales et surtout américaines pour accepter un cessez-le-feu à Gaza, et devant le refus de la frange la plus à droite de son gouvernement de mettre fin à cette guerre génocidaire, Benyamin Netanyahu serait tenté de faire diversion en acceptant un cessez-le-feu temporaire avec le Hamas à Gaza, en ouvrant simultanément un nouveau front au Nord avec le Hezbollah libanais. Et ce, sous prétexte d’assurer la sécurité de l’Etat hébreu, mais surtout pour s’assurer le soutien de ses alliés d’extrême droite pour mieux se maintenir au pouvoir.
En effet, deux figures de l’extrême droite israélienne- le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir et Bezalel Smotrich, le ministre des Finances qui prône l’évacuation des Palestiniens de Gaza- ont tous les deux appelé ces derniers jours à agir « en urgence » pour rétablir la sécurité dans le nord d’Israël.
« Ils mettent le feu ici. Tous les bastions du Hezbollah devraient aussi brûler et être détruits ». « GUERRE », avait écrit mardi dernier le premier dans un message sur le réseau Telegram. Bezalel Smotrich avait déclaré pour sa part que l’armée israélienne « devrait envahir le Liban » et repousser « des centaines de milliers de Libanais de la zone frontalière entre les deux pays ». Pas moins que cela.