Depuis deux jours, la principale information économique est la hausse des avoirs en devises. Pourtant, ce n’est pas quelque de vraiment nouveau. D’ailleurs, le solde à la date du 18 juin 2024 (23 363,9 MTND) est inférieur à celui du 13 juin 2024. Encore, à la fin du premier trimestre 2024, le nombre de jours d’importation a chuté, en glissement annuel, de 14 jours. Il s’agit d’un cycle économique dont la dynamique est à décortiquer.
Les analyses se sont donc concentrées sur la simple comparaison sur une année glissante, sans réellement penser en revue la structure de ces avoirs pour comprendre l’origine et donner des projections.
Une performance
Par rapport à la même date en 2023, les avoirs nets en devises ont progressé de 822,7 MTND. Pour comprendre l’importance de ce chiffre, il faudra aussi voir le chemin que nous avons traversé depuis. Sur la période Mars 2023 – Décembre 2023, l’Etat a assuré un service de dettes étrangères de 7 118,4 MTND. Il faut ajouter à ce montant les 4 971,6 MTND remboursés depuis le début de l’année 2024 jusqu’à fin mars. Cela nous donne une charge totale de 12 090 MTND, en 12 mois, ce qui n’est pas rien pour un pays de la Taille de la Tunisie.
En parallèle, quelles sont les ressources mobilisées sur la même période? Selon les rapports d’exécution du Budget, le montant total s’élève à 5 689 MTND, dont 408,3 MTND sur le premier trimestre 2024. En net, nous avons consommés 6 401 MTND. Personne ne peut nier qu’il s’agit d’une performance.
Par ailleurs, il faut se concentrer sur le montant de ces réserves et non sur le nombre de jours d’importations car cette mesure est variable. Le journée d’importation moyenne pèse 218,354 MTND à la date du 18 juin 2024 contre 232,383 MTND à la même date en 2023. En d’autres termes, sur la base d’un même dénominateur, nous constatons que si le rythme des importations est resté parfaitement stable, nous aurions une couverture de 101 jours d’importation à la date d’hier. Le plus important dans cet indicateur est qu’il soit supérieur à 90 jours, le seuil psychologique mais qui n’est pas une vérité financière.
Descente des comptes
L’amélioration de ces réserves provient, en premier lieu, de la balance commerciale. Selon les statistiques publiées ce matin, le déficit commercial s’est rétréci de 1 687,7 MTND sur les cinq premiers mois de 2024. Avec des revenus de travail de 3 167,8 MTND et des recettes touristiques de 2 311,4 MTND, la balance courante s’est fortement améliorée.
Si l’on ajoute les investissements étrangers (729,8 MTND jusqu’à fin avril 2024) et une stabilité dans le service de la dette extérieure remboursé par les opérateurs publics et privés (7 314,7 MTND), les avoirs en devises ont tenu bon. Le début d’année faste sur le front des paiements de prêts extérieurs, surtout l’Eurobond de février, a contribué aux contreperformances du premier trimestre, avant de se normaliser au cours du mois actuel.
Cela signifie que le service de la dette extérieure est la première menace dans la période à venir. Sur les 12 315 MTND programmés pour cette année, nous avons remboursé 4 971,6 MTND jusqu’à fin mars et certainement plus aujourd’hui. Il nous reste une échéance importante en octobre 2024, portant sur 50 Mds¥ (992 MTND), qui pourrait avoir le même effet que celle de février. Néanmoins, à cette date, on aurait déjà encaissé l’essentiel des recettes touristiques et les équilibres seraient mieux maintenus qu’aujourd’hui.
Enfin, cet équilibre demeure fragile. Nous avons besoin de ressources externes additionnelles pour que la machine fonctionne parfaitement. Actuellement, avec son refinancement extérieur net négatif pour la deuxième année de suite, l’Etat devrait intervenir sur le marché de change interne pour combler son déficit en devises. Le secteur productif se retrouve privé de suffisamment de moyens pour progresser.