A l’heure où le pays se prépare à voter pour sa douzième présidentielle, il est bon de rappeler le fil de l’histoire. Et de dire qu’avant la présidentielle de 2011 le peuple n’avait pas vraiment droit au chapitre.
La célébration des événements politico-historique est l’occasion de rappels historiques ou de bilans. C’est généralement l’un ou l’autre. Soit on revient sur des faits et gestes de personnages qui ont marqué l’histoire. Soit, on revient sur le fil d’un ensemble d’événements, pressé comme le sont souvent par le temps qui court les journalistes, dégageant quasiment toujours une certaine morale ou des conclusions plus ou moins hâtives, ou encore orientées en fonction des angles de vision de tout un chacun. Un exercice qui s’apparente, ici et là, ou s’approche d’un « storytelling » ; en somme une lecture de l’histoire dans laquelle le présent n’est pas toujours bien éloigné.
Et comme l’actualité est souvent le viseur servant, dans le journalisme, à pointer autant que possible le débat, la célébration aujourd’hui du soixante-septième anniversaire de la République est l’occasion d’évoquer les présidentielles de l’ère républicaine. Et vous l’avez compris : nos esprits sont occupés par la prochaine élection présidentielle du 6 octobre 2024.
« Du premier bey, Hussein Ben Ali, qui s’empare du pouvoir en 1705, et jusqu’au dernier, Mohamed Lamine Bey, qui accède au trône en 1943 et le quitte en 1957, avec la proclamation de la République, la succession se fait pour les quelque dix-neuf «possesseurs » du Royaume de Tunis selon la « règle » de primogéniture masculine au sein de la famille régnante ».
Selon la « règle » de primogéniture
Ces élections ne sont-elles pas des faits marquants de notre République? Avant 1957, les Tunisiens n’avaient pas droit au chapitre en matière de choix du premier magistrat du pays. Du premier bey, Hussein Ben Ali, qui s’empare du pouvoir en 1705, et jusqu’au dernier, Mohamed Lamine Bey, qui accède au trône en 1943 et le quitte en 1957, avec la proclamation du reste de la République, la succession se fait pour les quelque dix-neuf « possesseurs » du Royaume de Tunis (c’est ainsi qu’étaient appelés les beys) selon la « règle » de primogéniture masculine au sein de la famille régnante.
Le peuple avait-il réellement droit au chapitre au cours des douze présidentielles de notre République? La réponse est on ne peut plus évidente pour nous tous. En résumé, il n’y a eu réellement d’expression populaire que depuis 2011. Soit les présidentielles de 2011, de 2014 et de 2019. Certes, la présidentielle de 2011 n’a pas été comme les deux autres au suffrage universel. Mais le choix de Mohamed Moncef Marzouki a été opéré par l’ARP (Assemblée des Représentants du Peuple) élu au suffrage universel, direct et secret. Cela s’est fait du reste, dit-on, conformément à une Constitution qui a établi une organisation provisoire des pouvoirs publics.
« Nous sommes bien loin des 99,85 % de l’élection présidentielle de novembre 1974 (sous le président Habib Bourguiba) ou encore des 99,91% de mars 1994 (sous le président Zine El Abidine Ben Ali) ».
99,91 % en mars 1994
Il suffit de voir les résultats des élections de 2014 et de 2019 pour dire qu’il ne s’agit pas d’une élection « retouchée ». Loin s’en faut. Le président élu (Béji Caïd Essebsi) obtient, en 2014, 55,68 % des voix, et le président Kaïs Saïed, en 2019, obtient 72,71 %. Nous sommes bien loin des 99,85 % de l’élection présidentielle de novembre 1974 (sous le président Habib Bourguiba) ou encore des 99,91 % de mars 1994 (sous le président Zine El Abidine Ben Ali).
Un pan de l’histoire de notre République qu’il s’agit de rappeler en ce moment précis.