Alors que l’Etat cherche à réduire au maximum l’utilisation du cash et renforce son étau fiscal, les chiffres des moyens de paiement fraîchement publiés n’indiquent pas une évolution dans ce sens.
Il faudra tenir compte que cette période coïncide avec une situation économique peu porteuse, la promulgation d’un nouveau cadre réglementaire pour le chèque et l’entrée en vigueur de TEJ, la plateforme de la retenue à la source qui devrait faire mal aux fraudeurs.
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Les chiffres
Dans un premier temps, nous allons observer les statistiques semestrielles. Il en ressort que le nombre de chèques a baissé de 1,9 % en glissement annuel pour s’établir à 12,250 millions sur la période. En termes de valeur, il y a eu une hausse de 4,8 % à 61 754,840 MTND.
Idem pour les lettres de change, qui ont reculé aussi bien en nombre (-5,1 % à 830 mille) qu’en valeur (-2,3 % à 16 437,800 MTND).
Si nous affinons encore l’analyse en ne regardant que les chiffres trimestriels, nous constatons que 6,13 millions de chèques (6,15 millions au second trimestre 2023) ont été échangés sur la période avril/juin 2024, pour une valeur globale de 30 838,470 MTND (29 419,380 MTND au second trimestre 2024).
Pour les lettres de change, 410 mille lettres ont été émises (430 mille au deuxième trimestre 2023) pour une valeur globale de 8 092,889 MTND (8 173,380 MTND au second trimestre 2023).
En outre, le nombre de cartes a chuté de 24,0 % à 5 364 millions de cartes. C’est un grand point d’interrogation, car nous pensons qu’il y a eu un changement au niveau de la méthodologie. C’est assez curieux de voir près de 1,7 million de cartes disparaître du circuit en seulement six mois.
Le nombre de TPE a augmenté de 5,1 % à 37 200 terminaux. La valeur des paiements de proximité a évolué de 9,3 % à 2 324,7 MTND grâce à 19,1 millions d’opérations. Les e-paiements ont progressé de 16,8 % en termes de nombre à 8,8 millions et de 2,3 % en valeur à 550,900 MTND.
Pour le second trimestre, les paiements de proximité ont totalisé 1 238,300 MTND (1 135,1 MTND au second trimestre 2023); alors que les e-paiement étaient de 275,600 MTND (320,600 MTND au second trimestre 2023).
Il y a un recours moins accru aux moyens de paiement, ce qui montre que le cash gagne du terrain. Il suffit de jeter un coup d’œil sur les billets & monnaies en circulation, de 22 672 MTND, pour constater qu’il y a de plus en plus de liquidités utilisées par les différents agents économiques.
Les enseignements
Les statistiques attestent, globalement, qu’il y a un fléchissement au second trimestre 2024. Si nous tenons compte de l’inflation, qui augmente mécaniquement les valeurs des transactions, le tableau devient encore plus inquiétant.
Il y a un recours moins accru aux moyens de paiement, ce qui montre que le cash gagne du terrain. Il suffit de jeter un coup d’œil sur les billets et monnaies en circulation, de 22 672 MTND, pour constater qu’il y a de plus en plus de liquidités utilisées par les différents agents économiques.
A notre avis, il y a deux principales raisons derrière cette tendance.
La première est que la réponse à une plus grande pression fiscale sur le commerce parallèle et les pratiques de fraudes est la tentative des agents économiques de minimiser leurs expositions, en assurant de plus en plus de transactions en liquide.
La seconde raison est que la nouvelle loi sur les chèques n’est pas encore totalement assimilée. Ce moyen de paiement, qui ne peut plus être utilisé comme moyen de garantie, va perdre sa place. Et nous pensons que les prochains trimestres, y compris celui en cours, afficheront de nouvelles baisses en nombre et en valeur.
Enfin, cela prouve encore une fois que les frais bancaires ne sont pas l’entrave à une plus grande utilisation des moyens de paiement. Il y a eu des avantages en matière de tarification cette année, sans que cela donne un impact réel sur les statistiques. Nous devons admettre que la fraude est, malheureusement, une culture ancrée et qui domine encore. La combattre nécessite du temps, mais surtout des mesures concrètes pour mettre les bases d’une autre culture.