L’inflation est au cœur des préoccupations des consommateurs. Il suffit d’aller chez l’épicier du coin pour se rendre compte de l’ampleur de la hausse des prix. Chaque mois, l’indice des prix à la consommation est publié, et montre que la vie devient de plus en plus chère.
Et pour la Banque centrale de Tunisie (BCT), c’est un vrai casse-tête. Selon les dernières estimations, l’inflation moyenne pour 2024 devrait se situer à 7%, alors que celle sous-jacente s’établirait à 7,2%.
Qu’est-ce que l’inflation sous-jacente ?
L’inflation de base (ou sous-jacente) est une mesure de l’inflation qui exclut les composantes dont les prix sont encadrés par l’Etat ou qui sont volatils. Elle vise à fournir une vision plus stable et à long terme de l’inflation et est souvent utilisée pour guider les décisions de politique monétaire. La valeur obtenue est plus étroitement liée à des facteurs tels que la croissance économique, les conditions du marché du travail et la demande des consommateurs.
La mesure de l’inflation de base est donc précieuse pour les Banques centrales lorsqu’elles prennent des décisions de politique monétaire, car elle les aide à évaluer le véritable état actuel de l’inflation et sa trajectoire future, ce qui les aide à décider s’il convient de relever ou d’abaisser les taux d’intérêt.
Elle est aussi importante pour les entreprises, les investisseurs et les consommateurs, car elle fournit une meilleure indication de la manière dont les prix évoluent à long terme, ce qui peut aider à prendre des décisions et à planifier les actions à entreprendre.
Les principaux moteurs de l’inflation de base
Avoir une inflation de base aussi élevée est un dur exercice. Généralement, il y a cinq facteurs classiques qui peuvent interagir de manière complexe et l’importance relative de chacun d’entre eux variera dans le temps en fonction des conditions économiques et financières spécifiques.
Il s’agit de :
– La croissance économique : A mesure que l’économie se développe, la demande de biens et de services augmente, ce qui exerce une pression à la hausse sur les prix. Ce n’est pas le cas en Tunisie car la croissance est faible et la demande stagne, aussi bien interne qu’externe.
– Les conditions du marché du travail : Un marché du travail tendu, avec un faible taux de chômage et des salaires en hausse, peut augmenter les coûts de la main-d’œuvre et faire grimper les prix. Egalement, la création d’emplois est très faible en Tunisie et les revalorisations salariales de ces dernières années sont toujours inférieures à l’inflation.
– La politique monétaire : Les actions de la Banque centrale peuvent affecter l’inflation en modifiant les taux d’intérêt et la masse monétaire. La BCT a rehaussé le taux de 8% depuis décembre 2022 pour tenter de contrôler la monnaie en circulation et contrôler les prix. Ce facteur est donc à éliminer dans notre cas.
– Les facteurs mondiaux exogènes : Les changements dans l’économie mondiale, telles que les variations des taux de change et des prix des matières premières, peuvent également avoir un impact sur l’inflation. C’est un premier élément à retenir pour le cas de la Tunisie, qui importe l’essentiel des matières premières et des denrées alimentaires. Bien que ces dernières soient exclues de l’inflation sous-jacentes, elles impactent directement le reste des groupes de produits et services. La baisse observée à l’échelle mondiale n’est pas automatiquement répercutée sur les prix locaux, ce qui explique, en partie, la persistance de l’inflation.
– Les coûts de production : L’augmentation des coûts de production peut également contribuer à l’inflation. C’est un deuxième facteur à retenir du moment que les charges financières, les factures de l’électricité et les cotisations sociales ont fortement augmenté ces dernières années. Le point mort est devenu plus dur à atteindre, ce qui explique la pratique de prix de vente plus élevés.
Le taux de change, l’autre souci majeur
Le résultat est une autre formulation classique de l’inflation : trop d’argent pour trop peu de biens. Dans cette perspective, le remède à l’inflation consiste pour la Banque centrale à augmenter le coût de l’emprunt au point que les gens cessent de dépenser et commencent à épargner. L’argent sort de l’économie et les prix se stabilisent.
Vu sous cet angle, l’inflation peut sembler un problème facile à résoudre. Mais que se passe-t-il si la hausse des prix est le résultat de facteurs plus structurels ? L’augmentation des taux d’intérêt pourrait contribuer à faire baisser la croissance économique sans donner les résultats escomptés en matière d’inflation, ce qui semble être le cas tunisien.
Pourtant, la BCT a confirmé son taux directeur à 8%. La raison est simple : le lien direct avec le taux de change et ce taux. En préservant la valeur du dinar, nous évitons une spirale inflationniste de laquelle il serait impossible de sortir indemne. De plus, les réserves en devises seront protégées, ce qui nous donne la capacité de faire face aux remboursements de dettes étrangères dans une période où les ressources étrangères se font rares.
De plus, est-ce que la réduction de 25 ou de 50 points de base va réellement relancer l’investissement ? la réponse est non, car nous allons encore rester à des crédits à deux chiffres. Le problème est plus structurel et c’est au gouvernement de procéder aux réformes nécessaires pour relancer l’économie.