Le rôle du système bancaire demeure déterminant pour le financement de l’économie. A travers les projets que les banques choisissent de financer, elles seront responsables de l’émission de gaz à effet de serre et cela en fonction de l’exposition de leur portefeuille de prêts aux secteurs à forte intensité carbone.
D’après le Dashboard du FMI sur le changement climatique présenté récemment et dont les données sont disponibles pour seulement 41 pays, le portefeuille de crédit des banques tunisiennes aurait une empreinte carbone forte, ce qui entraîne des risques de transition élevés. Le chemin de la transition vers une économie à faible émission de carbone est semé d’embûches pour le secteur financier :
– Un risque pour la résilience des banques qui pourrait déboucher sur un risque systémique : Réduire l’exposition des banques aux risques de transition pourrait avoir un impact sur la pérennité des entreprises qui font appel à des emprunts dont l’empreinte carbone est forte. En effet, le passage à une finance durable entraînerait des investissements importants et les entreprises fortement endettées dans des secteurs polluants pourraient rencontrer des difficultés à financer cette transition et à honorer leurs engagements auprès des banques. Du coup, des banques plus vulnérables et un système financier menacé d’instabilité.
– Un risque réputationnel : Les banques se trouvent face à un dilemme. Soit elles profitent et poursuivent le financement des grandes entreprises polluantes, quitte à risquer leur réputation face aux pressions internationales dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat ! Soit elles adoptent une approche responsable et saisissent l’occasion de s’inscrire dans l’innovation et le financement de la transition vers une économie à bas carbone pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique, et elles courent alors le risque de financer des projets pas très rentables à court terme ! Le secteur bancaire a besoin d’un coup de pouce réglementaire pour le remettre sur le chemin de la digitalisation et de la transition écologique plutôt que d’une déstabilisation avec de nouveaux textes réglementaires formulés dans la précipitation, qui menaceraient la stabilité financière de la place. Cela pourrait dans certains cas être étouffant pour l’activité commerciale dans une économie qui peine à sortir d’une croissance atone.
Toutefois, peut-on espérer voir le secteur bancaire tunisien jouer pleinement son rôle dans la transition lorsque les politiques publiques demeurent privées de vision ?
Par Noura Harboub Labidi
Cet article est disponible dans le mag de l’Economiste Maghrébin n 904 du 9 au 23 octobre 2024