A J-5 de l’élection présidentielle américaine, Donald Trump et Kamala Harris sont toujours au coude-à-coude. Le suspense demeure total.
Jamais dans l’histoire des Etats-Unis, un duel entre les candidats à la Maison Blanche n’a été aussi serré. Ainsi, à quelques jours de la date fatidique du 5 novembre, les deux candidats en lice pour la course présidentielle – en l’occurrence le républicain Donald Trump et la vice-présidente démocrate Kamala Harris – sont dans un étroit mouchoir de poche, rendant l’issue du scrutin particulièrement incertaine.
Alors quel crédit accorder aux sondages américains peu fiables au demeurant, particulièrement observés à la loupe, commentés et analysés et qui, de plus, varient d’un jour à l’autre? Et ce compte tenu du mouvement balancier des swing-states, ces sept États clés qui pourraient faire basculer l’élection d’un côté comme dans l’autre.
Des sondages à côté de la plaque en 2016
Pour rappel, lors de l’élection de l’actuel président Joe Biden en 2020, les prévisions avaient vu juste quant à sa victoire même si elles étaient gonflées en sa faveur. Il faut reconnaître que cette victoire était facile à prévoir d’autant plus qu’il faisait la course en tête dans les sondages plusieurs semaines avant le scrutin et qu’il était crédité de 53,3 % des voix au niveau national au 1er novembre, deux jours avant le scrutin.
En revanche, quatre ans plus tôt, en 2016, les sondages étaient unanimes à prévoir la victoire d’Hillary Clinton. Et c’est finalement Donald Trump qui remporta à la surprise générale la présidentielle. Une claque assourdissante pour l’ensemble des instituts de sondages aux Etats-Unis.
Finalement, en dépit de l’adhésion populaire des Américains pour le camp démocrate. Hillary Clinton aura récolté à l’époque trois millions de voix de plus que Donald Trump. Mais c’est bien ce dernier qui remporta le scrutin, avec ses 304 grands électeurs, contre seulement 227 pour la candidate démocrate. C’est qu’aux États-Unis, l’élection ne se joue pas au suffrage universel direct mais État par État. Le candidat vainqueur n’est pas forcément celui suscitant l’adhésion populaire mais celui qui remporte le soutien du plus grand nombre de grands électeurs.
Incertitudes
Alors, prudence. A quelques jours de la date fatidique de l’élection américaine, que ce soit à l’échelle nationale ou dans les Etats pivots, l’écart se resserre drastiquement entre les deux candidats à l’approche du scrutin.
« Les sondages se trompent plus souvent aux Etats-Unis qu’en France quand il s’agit de prédire un scrutin présidentiel », assure Jérôme Viala-Gaudefroy, docteur en civilisation américaine. Ajoutant que pour cette campagne présidentielle 2024, « on est actuellement dans la marge d’erreur de trois ou quatre points de plus ou de moins, soit huit points au maximum », abonde la même source. Tout en en concluant : « Personne ne sait ce qu’il va se passer. Même les sondages ». Alors, à quel saint se vouer?
Un système électoral alambiqué
L’explication la plus plausible réside dans la complexité déroutante du système d’élection présidentielle : aux Etats-Unis, le président est élu par le collège électoral où chaque État est représenté par un certain nombre de grands électeurs proportionnel à sa population.
Ainsi, dans la plupart des États où se dessinent des majorités claires, le scrutin majoritaire permet au candidat qui remporte la majorité des voix populaires dans un État d’obtenir la totalité des grands électeurs. Or, dans les sept États-clé, en l’occurrence le Nevada, Arizona, Wisconsin, Michigan, Pennsylvanie, Caroline du Nord, Géorgie, les marges de victoire dans ces États pivots avaient été extrêmement faibles, souvent inférieures à 1 %. Et ce, lors des deux dernières élections présidentielles, en 2016 et 2020.
Le hic, c’est qu’avec ces marges extrêmement étroites dans les Etats pivots, parfois des milliers ou des centaines de voix, il est très difficile de mesurer avec précision les intentions de vote et, a fortiori le résultat final, rendant impossible tout pronostic sérieux pour les deux candidats en lice.
Ajoutons à ces erreurs d’appréciation la participation insuffisante des sympathisants républicains dans les sondages – certains électeurs de Trump, notamment les Blancs de la classe ouvrière cachent sciemment leurs intentions de vote -, la surreprésentation des diplômés de l’enseignement supérieur, plus enclins à voter démocrate et une sous-estimation des électeurs indécis à l’instar de la communauté arabo-américaine, déçue par le soutien inconditionnel de l’administration Biden-Harris à l’Etat hébreu sans pour autant être prête à se jeter dans les bras du milliardaire républicain.
Des sondages en dents de scie
Au final, peut-on se fier aux sondages en général et au pays de l’Oncle Sam en particulier? Et qui croire?
La toute dernière enquête d’opinion sur la présidentielle américaine publiée le 30 octobre par The Economist et YouGov donne une légère avance à Kamala Harris qui totaliserait 49 % des intentions de vote contre 47 % pour Donald Trump.
L’écart est moins grand dans le sondage de Reuters en partenariat avec Ipsos. Ce dernier, réalisé entre les 25 et 27 octobre, place Kamala Harris en tête avec 44 % des intentions de vote, talonnée par Donald Trump avec 43 %.
Il en va de même dans l’enquête de CBS News où la démocrate devance le républicain d’un point de pourcentage (50 % contre 49 %).
Par contre, dans le sondage de CES (Cooperative Election Study) en collaboration avec YouGov, la marge entre les deux candidats est bien plus grande, puisque Kamala Harris récolte 51 % des intentions de vote et Donald Trump 47 %.
Tandis que dans l’enquête du New York Times et du Siena College, réalisée entre le 20 et le 23 octobre, le républicain et la démocrate sont à égalité (48 % – 48 %). Tout comme dans le sondage de CNN, effectué aux mêmes dates (47 % – 47 %).
Enfin, dans l’étude du Wall Street Journal, c’est Donald Trump qui mène la danse avec 47 % des intentions de vote, contre 45 % pour Kamala Harris.
De quoi nous donner le tournis, si on oubliait que les sondages électoraux sont au mieux des instantanés assez imprécis, qui peuvent éventuellement indiquer des tendances, mais aucunement une science exacte.