D’après les déclarations du représentant syndical du personnel portuaire de Bizerte sur une chaîne hertzienne, les grèves vont se succéder aussi bien au port de Bizerte, avant la fin du mois de juillet que dans les autres ports du pays les 1er et 2 août prochains. Une grève qui s’ajoute au «ralenti » de l’activité portuaire à observer durant les trois jours chômés de l’Aïd et qui constituera « la mahba de l’Iftar» pour les exportateurs et la balance commerciale de la Tunisie, déjà largement fragilisés. La Tunisie portuaire va donc, à l’instar des pays du Golfe, s’offrir une dizaine de jours de repos à l’occasion de l’Aïd, réconfortée, comme elle peut l’être, par la même mer de pétrole sur laquelle baigne la péninsule arabique.
Les grévistes vont donc essayer d’avoir gain de cause sur des revendications qui, disent-ils, datent de trois ans en augmentant leurs revenus, en accélérant la sortie de devises pour « surestaries » (frais dus par un navire pour dépassement de délai de séjour dans un port), comme en 2013 où l’on a comptabilisé à ce titre 90 millions d’euros, et en pénalisant, encore plus, une économie en souffrance chronique depuis le 14 janvier 2011. Ce comportement s’ajoutera, bien sûr, à la performance déjà « énorme » des collègues manutentionnaires qui ont battu des records de productivité réalisant le triste score de 2 conteneurs débarqués par heure alors que sous d’autres cieux, ceux des gens qui travaillent, trente-cinq conteneurs sont débarqués toutes les soixante minutes. Un record qui coïncide avec un autre, celui des heures supplémentaires servies, avec un poste salaire inférieur à celui de la rémunération en heures supplémentaires, enregistré au niveau des comptes de la STAM pour l’année 2013. Tant de performances négatives, tant d’impact sur la balance devises et, finalement, une prise en otage de la balance commerciale. C’est là la performance 2014 de nos ports qui sera, encore une fois, récompensée par le gouvernement payant, rubis sur ongle, les jours de grève en demandant au contribuable, soumis à la retenue à la source, de faire encore un peu plus pour…encourager de tels comportements. Et bis repetita dans quelques jours, pour d’autres secteurs avec comme sanction une Tunisie prise en otage et des dépenses publiques encore plus importantes pour payer les grévistes qui, quand ils travaillent, tutoient les records dans leur domaine d’activité. Triste réalité qui va encore perdurer tant que l’Etat ne se décidera pas à sanctionner de tels agissements et tant que le salaire est considéré comme aide sociale acquise contre vents et marées.
La grève du personnel du port de Bizerte et, si elle aura lieu, celle des autres ports serait, en quelque sorte, une réponse du berger à la bergère, après les déclarations de la présidente de l’UTICA et les remontrances de Mehdi Jomaa, liées à la situation du port de Radès. Port, il faut le rappeler, dans lequel la STAM est dans une situation de monopole, contrairement à tous les autres ports du pays où un groupement d’acconiers privés est en concurrence directe avec elle et où les performances sont nettement meilleures avec 17 conteneurs débarqués par heure contre une moyenne de 7 au port de Radès. Et à la question du pourquoi du maintien en l’état de la situation du monopole à Radès, seuls les pouvoirs publics pourront, enfin, y répondre et se rendre à l’évidence des chiffres et essayer d’y remédier. Sinon, c’est accepter de faire payer à tout un pays le comportement scandaleux d’une partie du personnel portuaire.