Plan A ou plan B. Quasiment tous les partis politiques ont une stratégie pour l’avant et une autre pour l’après 26 octobre 2014, date des élections législatives en Tunisie. Et toutes les alliances, contrairement aux apparences, pourraient voir le jour. Analyse.
Alors que les élections législatives s’approchent à grand pas (le 26 octobre 2014), les Tunisiens semblent repartir du bon pied concernant les inscriptions sur les listes électorales : près de 748 000 nouveaux inscrits au 29 juillet 2014 si l’on en croit l’ISIE (Instance supérieure indépendante des élections), qui a prolongé au 29 juillet 2014 la date limite des inscriptions.
Ce qui porte à près de cinq millions 113 000 le nombre des inscrits sur les listes électorales. Nous sommes loin, diront des observateurs, des quatre millions souhaités pour cette campagne de nouvelles inscriptions inaugurée le 23 juin 2014. Formons, toutefois, l’espoir de voir le rythme des inscriptions s’accélérer avec l’ouverture d’une nouvelle période d’inscription (du 5 au 26 août 2014).
Par ailleurs, signature, le 22 juillet 2014, d’une charte d’honneur entre 23 partis politiques pour « une opération électorale transparente, loyale, démocratique et crédible ». Les signataires se sont, en outre, engagés à « atténuer les conflits et à préserver la paix civile ».
Outre ces deux événements l’opinion s’intéresse déjà aux faits et gestes d’une classe politique qui s’est déjà installée dans la bataille. A commencer par Ennahda et Nida Tounes que l’on dit pouvoir obtenir des scores bien plus importants que ceux des autres formations politiques. Et cette « obsession » qui dit que si les deux partis ne constitueront pas un front avant le 26 octobre, ils pourraient gouverner le moment venu ensemble !
De toute façon, assure-t-on, Ennahda et Nidaa Tounes ne pourraient pas envisager l’avenir autrement s’ils se trouvaient en tête des scores des prochaines législatives. Avec pour chacun près du quart des votes. Comme le prédisent plus ou moins les sondages. Mais faut-il croire aux sondages ?
Pourquoi pas une alliance Ennahda et Nidaa Tounes qui seraient beaucoup plus proches qu’il n’y paraît ? D’ailleurs, estiment certains analystes, une partie des destouriens, qui constituent une partie des bataillons de Nidaa Tounes, a toujours eu une sensibilité islamiste. Le Parti destourien (l’arche-destour), fondé en juin 1920, et dirigé par Abdelaziz Thâalbi, un zeitounien pur jus, comptait dans sa direction de nombreux dignitaires gagnés par des idées panislamistes.
N’ a-t-on pas enterré, par ailleurs, trop vite Ettakatol et le CPR ?
Cette vision a-t-elle trop vite enterré le Front populaire, constitué de partis se réclamant de la gauche et du nationalisme arabe. Peut-être. Dans la mesure où cette composante du paysage politique tunisien est capable de jouer un rôle central dans les alliances à construire demain. Le Front populaire est crédité d’une fourchette allant de 7 à 10% des intentions de vote. Il pourrait être de ce fait la composante sans laquelle aucune majorité ne pourrait voir le jour.
Quelles sont les chances d’Al-Jamhoury (le Parti républicain), d’Al Massar (la Voie démocratique et sociale), de Tayar Al Mahaba (le Courant de l’amour), d’Al Itilaf Al Dimoqrati (l’Alliance démocratique), d’Affek Tounes (Horizons de Tunisie), pour ne citer que ces derniers mouvements ? Tout est possible, pour ainsi dire, concernant des mouvements et partis qui sont capables de mobiliser l’opinion. Hachmi Hamdi, actuel président du Tayar Al Mahaba, n’a-t-il pas constitué la surprise des élections du 23 octobre 2011 en plaçant son parti au troisième rang ?
N’a-t-on pas enterré, par ailleurs, trop vite Ettakatol, le CPR (Congrès Pour la République) ou encore les partis qui ont fait « sécession » de ce dernier mouvement comme Wafa (fidélité) ou encore Attayar Al Dimocrati (le Courant démocrate), et bien d’autres ?
Là aussi, des surprises peuvent secouer ceux qui pensent dur comme fer que ces partis ont fait leur temps du fait qu’ils ont participé à la gestion du pays dans les gouvernements Ennahda ou en sont plus ou moins, à leurs yeux, associés à cette gestion?
Reste que l’essentiel pourrait ne pas être là. En effet, tout va se jouer peut-être au niveau des listes communes qui pourraient être constituées. L’UPT (Union Pour la Tunisie) pourrait-elle avancer, par exemple, en rangs serrés ? Et dans quelles proportions les mouvements qui la composent seraient représentés ?
Les partis de l’UPT ont encore certes du temps pour s’entendre sur la stratégie à adopter (jusqu’au 22 août 2014). Dans le cas de listes communes –on peut le comprendre- la perspective d’une « alliance » entre Ennahda et Nidaa Tounes au lendemain du 26 octobre ne pourrait que difficilement être envisagée.
Mais là encore tout dépendra –encore une fois- des résultats des législatives. Car, les partis ne peuvent autrement envisager d’avancer avec deux stratégies : une pour l’avant 26 octobre 2014 et une autre pour après cette date. Une sorte de plan A et de plan B.
Sans oublier la Présidentielle qui ne peut échapper aux ententes, calculs et aux manœuvres des uns et des autres pour ces législatives.