« Les libertés économiques en Tunisie » sont le thème principal du colloque organisé aujourd’hui par l’Economiste maghrébin, en collaboration avec la fondation « Friedrch Naumann pour la liberté, l’Institut Fraser et l’Arab Center for scientific research and human studies »
Après les allocutions d’ouverture, Fred McMahon, vice-président de l’Institut Fraser a présenté des données du rapport sur les libertés économiques en Tunisie 2014. L’intervenant a déclaré que la Tunisie peut être un exemple à suivre pour le monde par son approche extraordinaire pour la résolution pacifique des conflits, ajoutant que d’importantes avancées dans le développement économique, l’expansion des libertés et la tolérance institutionnelle ont été réalisées. Mais tout cela reste tributaire d’une nouvelle vision économique car « si les anciennes structures économiques sont préservées ou seulement légèrement adaptées, on ne peut pas s’attendre à des résultats différents sur la croissance et l’égalité » (Amin et al., P13).
Présentant la notion de liberté économique, l’orateur a déclaré qu’elle procure aux producteurs et aux vendeurs le droit à la libre concurrence sur un pied d’égalité sans qu’ils ne soient soumis aux contraintes de la bureaucratie et de la rigidité réglementaire trop souvent mises en place pour donner l’avantage aux puissants et restreindre la liberté des autres.
Situant la Tunisie dans le classement basé sur les revenus par habitant et les libertés économiques, l’intervenant a déclaré qu’elle est classée troisième dans ce classement de 4 catégories des pays les plus libres vers les pays les moins libres et son score avoisine le tiers inférieur dans ce classement pour la période 2000/2008. La Tunisie accuse ainsi un retard en matière de libertés économiques et se trouve classée 96e sur 152 pays.
Pourtant, des reformes libérales ont été engagées sans que de véritables changements aient été enregistrées car « malgré cette législation libérale, toutes les décisions importantes, notamment celles relatives à l’investissement et à la privatisation, étaient prises au plus haut niveau ». Certains croient qu’une réforme néolibérale du marché libre a été essayée en Tunisie. Rien ne pourrait être plus éloigné de la réalité. Car malgré les présumées réformes, l’Etat de droit a décliné.
Présentant les critères de cet Etat de droit, l’intervenant a déclaré que cette primauté du droit inclut : l’indépendance judiciaire, l’impartialité des tribunaux, la protection des droits de propriété, la non-ingérence des militaires, l’intégrité du système juridique.
« La réforme a en fait permis à la famille élargie de l’ancien président de faire valoir ses propres intérêts en contrôlant des domaines dans pratiquement tous les secteurs importants. En d’autres termes, la législation a été utilisée comme couverture libérale pour tromper les institutions internationales. En réalité, la liberté économique a été réprimée par l’ancien régime et permettait à une élite privilégiée de manipuler les lois ».
Pour le vice-président de l’Institut Fraser, les libertés économiques ne réduisent pas la pauvreté mais elles améliorent les revenus des plus pauvres. Sur le plan démocratique, sans liberté économique les individus ne pourront pas s’exprimer sans crainte. De même, sur le plan économique, cette liberté permet de produire les biens et services que la population demande et les pays les plus libres économiquement sont ceux qui produisent pour leurs citoyens sans besoin d’autorisation et de permissions préalables et ainsi « votre destin est entre vos mains ».
M.Fred McMahon a ensuite présenté des cas de réussite de liberté économique dans le monde ajoutant que la Tunisie pourrait y figurer. C’est le cas de Singapour en Asie dont le PIB par habitant est passé de 5000 à plus de 35000 dollars de 1960 à 2011 grâce, notamment, à cette liberté économique. En Amérique latine, le PIB par habitant du Chili est passé de 2000 à environ 10.000 dollars de 1960 à 2011. En Afrique, l’orateur a cité le cas du Botswana dont le PIB/h est passé de 1000 à 7000 dollars pour la même période.
L’absence de liberté économique pourrait handicaper le développement. Soit, quel espace faut-il par conséquent aménager à cette liberté économique et comment la pondérer ? C’est entre autres questions dont les sept panels, qui ont suivi la séance inaugurale, ont eu à débattre.