Dans un environnement national et international caractérisé par des changements structurels et des transformations économiques, sociales, politiques, technologiques et environnementales très rapides, la consommation est la locomotive de la croissance en Tunisie et non pas l’investissement. Pourtant, l’amélioration et le renforcement de l’économie devraient passer par l’investissement, qui exige l’augmentation de la compétitivité des entreprises.
Ce contexte a mis en exergue, par conséquent , l’importance du rôle du secteur privé, l’accentuation de la concurrence entre les entreprises et les nations sur tous les marchés, la redéfinition du nouveau rôle de l’Etat et des politiques économiques nationales pour favoriser l’intégration des pays dans l’économie mondiale, et la redéfinition de la performance et de la productivité ainsi que son amélioration qui apparaît comme un critère de référence pour la compétitivité de l’entreprise et constitue une stratégie de long terme pour les décideurs économiques.
C’est dans ce cadre que l’IACE a organisé ce matin le Forum sur la loi de finances, ayant pour thème : « Analyse et mesures d’ajustement nécessaires».
Présent à cette rencontre, Walid Bel Hadj Amor, président du CTIVE-IACE, a déclaré que la loi de finances 2015 s’insère dans le contexte national et international, en se basant sur les hypothèses suivantes : un taux de croissance à prix constants de 3%, un taux de change dollar/dinar de 1.8 et un prix du baril de pétrole à 95 dollars, avec une batterie de priorités et grands équilibres imposés par la conjoncture.
Néanmoins, M. Bel Hadj Amor a précisé que les dispositions des LF 2014, LFC 2014 et LF 2015 ont démontré que la productivité, en tant que clé de compétitivité, n’a pas suivi la courbe ascendante des salaires, ce qui a résulté en une baisse des IDE, des entreprises nationales fragiles, une baisse de la production/travailleur, baisse de l’emploi total, augmentation du chômage et renforcement des politiques économiques de relance.
De ce fait, les contributions proposées par la LF 2015 doivent, selon ses dires, faire l’objet d’une analyse approfondie et multidimensionnelle, et ce, parallèlement à l’effet attendu de la suppression de la subvention des produits de base ainsi que la levée du secret bancaire.
A cet égard, des mesures d’ajustement sont-elles nécessaires ? Faut-il recourir à une loi de finances complémentaire 2015 ? Autant de questions que l’on se pose.
La loi de finances complémentaire s’impose-t-elle ?
En réponse à ces interrogations, un débat présidé par Slim Chaker, président de la commission économique et sociale de Nidaa Tounes, Noomen Fehri, Rapporteur adjoint au sein de la commission spéciale chargée des finances au Parlement- Afek Tounes et Slim Besbes, président de la commission spéciale chargée des finances au Parlement, a été tenu, en marge du Forum, autour de la LFC 2015, dans lequel les responsables ont été unanimes pour dire que la LFC pour l’exercice 2015 n’est pas indispensable car selon Slim Chaker, le nouveau gouvernement aura comme priorité un plan d’urgence parallèlement à un plan quinquennal. Pour élaborer ce plan quinquennal, il faut, d’après le responsable, qu’il y ait un consensus large entre toutes les parties prenantes, afin de réussir le financement de l’économie nationale et l’amélioration des investissements.
Toutefois, pour le court terme, M. Chaker a fait savoir que des mesures d’urgence s’imposent car : » si la LF 2015 est au service de ces mesures, on n’aura pas besoin d’une LFC. Sinon,nous serons acculés à la préparer en un court laps de temps », avertit-il. Et d’ajouter que si la LFC n’est pas une nécessité, par contre, le plan d’urgence des 100 premiers jours du nouveau gouvernement est prioritaire.
Pour sa part, Noomen Fehri a souligné que la LF 2015 comporte plusieurs lacunes. Cependant, il se joint à ses collègues pour dire qu’il n’est pas nécessaire de recourir à une LFC : «Il vaut mieux se pencher sur les préoccupations des entrepreneurs et des citoyens, résoudre les problèmes des projets en stand-by plutôt que de se concentrer des mois durant sur la LFC, et se baser sur le partenariat public-privé (PPP) pour exécuter les ressources budgétaires», a-t-il estimé.
Il a martelé que le plan quinquennal est tout aussi important, dans cette phase, que la LFC, «parce qu’on peut opter pour des ajustements simples, notamment au niveau de l’énergie. On doit plutôt simplifier et prendre une décision pour la fiscalité afin de créer la richesse». Le responsable n’a pas manqué de dire que son parti est très pragmatique et a une vision socioéconomique basée sur des mesures d’urgence, telles que le PPP, le tourisme et une loi pour lutter contre le problème des déchets.
Quant à Slim Besbes, il a fait savoir que la LF est un instrument des prévisions des recettes et des dépenses. Il s’agit, selon ses propos, d’un ensemble de fonctions économique, sociale, structurelle et conjoncturelle. «Ce sens de la LF a été perdu ou amputé depuis la révolution, notamment au niveau de la fonction structurelle. Et on n’a gardé que la fonction financière conjoncturelle, afin de répondre aux pressions économiques et sociales pour parer au plus pressé».
Pour le budget 2015, ayant également une fonction financière, un ensemble de prévisions ont été établies sur la base des indicateurs économiques, dont la conjoncture des mois d’août et septembre 2014, prévoyant une stabilisation. » Malheureusement, l’aspect volontariste lié par la politique conjoncturelle n’a pas été clair, mais le défi relevé a été de présenter un cadre économique général pour l’exercice 2015 au nouveau gouvernement « , a-t-il affirmé.
Il a fait savoir, en outre, que La LFC est devenue, ces dernières années, une tradition, ayant pour but d’actualiser la conjoncture vu les dépenses non prévues ou non réparties. Mais si on est dans la phase d’un aménagement comptable, on peut le faire même en fin d’année dans le cadre de la LF 2016.
De ce fait, «le budget sera un véritable plan d’articulation parallèlement au plan quinquennal », a conclu Slim Besbes.