En célébrant la fête du 14 Janvier, la Tunisie réécrit son histoire. L’épopée de la libération nationale, remise en question par le coup d’Etat du 7 novembre, est réhabilitée et enrichie par la promotion citoyenne de la révolution (17 décembre 2010- 14 janvier 2011). Elle a fait valoir les normes de la gouvernance démocratique et institué l’Etat de droit.
Ne revenons pas sur les mises à l’épreuve des péripéties de la transition. Les velléités de confiscation de l’élan populaire ont échoué. Le citoyen tunisien a défendu ses droits, rejeté le faux combat identitaire et pris ses distances du discours du 6e califat, qui se proposait un retour passéiste rétrograde. La soft révolution de l’été 2013 a corrigé le processus de dérive, remis les montres à l’heure, et rétabli le consensus, en faveur d’une Constitution d’avant-garde. Il instaura un dialogue des acteurs et imposa un gouvernement non-partisan. Les élections parlementaires et présidentielles ont confirmé la dynamique de promotion révolutionnaire.
« Le temps du citoyen » doit faire valoir les droits du quotidien : l’emploi, le pouvoir d’achat et la qualité de la vie, qui inclut évidemment les conditions de la vie courante : droit de santé, réhabilitation du transport public, promotion des loisirs que les auteurs de la dérive ont essayé d’annihiler par leur chasse aux hommes de théâtre, aux saltimbanques du pop, et de tous les agitateurs de la pensée critique et du débat. La révolution tunisienne a condamné les discours des « incendiaires de la pensée ». Ses acteurs ont fait valoir le temps du citoyen, exigeant la satisfaction de ses attentes, la prise en compte de ses inquiétudes, par l’ouverture de ses horizons.
C’est ainsi que nous devons admettre les mouvements de protestation, en dépit de l’Etat de grâce du régime postélectoral. Mais ne perdons pas de vue les incidences financières des améliorations demandées. Il faut donner du temps au temps et règle d’or de tous les révolutionnaires : opter pour la mise en perspective plutôt que l’instantanéité.